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EXAMEN PAR UN GROUPE SPÉCIAL BINATIONAL
AUX TERMES DE L’ARTICLE 1904
DE L’ACCORD DE LIBRE-ÉCHANGE NORD AMÉRICAIN


Affaire des : FEUILLES ET FEUILLARDS DE LAITON IMPORTÉS DU CANADA Dossier du secrétariat No :
USA-CDA-98-1904-03

Lors de la détermination du dumping marginal, lITA a voulu calculer un CP moyen pondéré en se servant des données semestrielles fournies. Des signalement derreurs seraient alors apparus lorsque les données de Wolverine avaient été insérées dans le programme informatique de lITA. Dans un mémoire postérieure à la décision définitive, dont le Groupe spécial ne croit pas quil doive être considéré comme faisant partie du dossier administratif, lITA a cherché à expliquer quelle nétait pas parvenue à concilier lexistence du calcul dun CP pour certain CONNUM avec le fait quils navaient pas été produits au cours de certains semestres. Elle avait pensé que Wolverine navait pas fourni les quantités produites pour ces périodes. Aussi avait-elle supprimé la variable de la quantité produite ((PRODQTY) 2 du programme. Il en était résulté la production par le programme dun CP moyen « simple » (où un poids égal était donné à chaque semestre), où les coûts nétaient pas associés aux quantités effectivement produite (comme dans une moyenne « pleinement » pondérée). 3

Dans ses Résultats préliminaires, lITA jugea de minimis le dumping marginal de Wolverine. Les conséquences de la suppression du programme de sa ligne PRODQTY ne semblent pas avoir été comprises à cette époque par les parties.

(1) LITA a-t-elle violé le § 1677(m) (d) du 19 USC ?

Wolverine dit quelle na pas interprété le questionnaire additionnel comme une demande de révision des données quelle avait fournies en fonction du CP dune période du réexamen (dun coût annuel). Rien dans le dossier ne permet de contredire cela. La question ne fait pas référence à un coût moyen pondéré « annuel ». La question est trop vague pour quon puisse en déduire quil est raisonnable de penser que Wolverine aurait dû savoir que, ce qui était demandé, cétait un coût moyen pondéré annuel. Sil est vrai que lITA pense avoir demandé un CP annuel, elle reconnaît ne pas avoir demandé de plus amples informations ni considéré les coûts de production semestriels de Wolverine comme déficients en quoi que ce soit. Qui plus est, la « simple » moyenne calculée par lITA portait sur six semestres, non quatre, comme on laurait attendu pour la moyenne dun CP annuel.

Wolverine a fait valoir que lITA navait constaté comme insuffisante quune seule réponse, et cela aux derniers stades de linstance en révocation. LITA prétend que, lorsquelle lança pour la première fois son programme de calcul marginal, elle observa certains signaux derreurs dans les extrants qui en résultèrent, lesquels étaient dus au contenu et à la forme des données fournies par Wolverine. LITA avait alors conclu que les quantités nulles de production étaient dues à des déficiences de la réponse de Wolverine puisquun coût de production était donné pour les mêmes produits. Aussi la raison initiale donnée par lITA a-t-elle été quelle avait été forcée dutiliser la moyenne simple (arithmétique) pour calculer le CP des nouveaux CONNUM. Au cours du présent examen, lITA a reconnu avoir fait erreur en ne pondérant pas comme elle aurait dû le faire les coûts de production contractés et cest pourquoi elle a demandé davoir la possibilité de corriger cette erreur.

Lindustrie américaine fait valoir, devant ces faits, que Wolverine ne sest pas conformée aux instructions de lITA qui lui demandait de fournir un coût moyen pondéré unique pour chaque produit discret représenté par un numéro de contrôle spécifique le désignant. Elle prétend que Wolverine a délibérément choisi de ne pas tenir compte des instructions de lITA à deux égards importantes lorsquelle a fourni les données sur ses ventes et ses coûts. En premier lieu, Wolverine avait inséré une caractéristique physique de son propre choix dans le système CONNUM, prétendant que lITA devait se fonder sur une caractéristique permettant de distinguer entre les produits quelle disait être « en feuilles » et ceux quelle qualifiait de rubans (ou feuillards). En second lieu, elle avait fourni des coûts moyens pondérés semestriels pour chaque numéro de contrôle, non un coût moyen pondéré unique. En dépit de demandes claires et répétées, aux dires de lindustrie américaine, Wolverine, selon elle, aurait choisi de ne pas tenir compte des instructions de lITA et aurait refusé de fournir un coût moyen pondéré unique sans distinction entre les produits en feuilles et ceux en ruban.

Lon admet que lITA, initialement, voulait pondérer les chiffres sur les coûts par les quantités produites indiquées par Wolverine. Mais, comme il a été dit, lorsque lITA avait voulu pondérer ces données, elle sétait heurtée à des signaux derreurs dans les extrants qui en étaient résultés, lesquels étaient dus à la teneur et à la forme des données. Le problème était que les données sur les coûts comportaient un nombre appréciable de quantités nulles au titre de la production dans lensemble de la réponse au titre des coûts, ce dont lITA avait décidé de ne pas tenir compte dans ses calculs. Lindustrie américaine a adopté comme position que, compte tenu des problèmes que posaient les données sur les quantités produites de Wolverine, cétait à bon droit que lITA navait pas tenu compte des productions données comme nulles et quelle avait utilisé un CP moyen simple pour les CONNUM contractés.

Wolverine réplique que le seul avis reçu par elle susceptible de lui indiquer que sa réponse était insuffisante avait été le Mémoire du 24 juin 1998, reçu après que la Décision définitive ait été rendue et après que Wolverine eût appelé lattention de lITA sur son erreur « décriture ». Toutefois, fait observer Wolverine, [TRADUCTION] « le Mémoire du 24 juin ne cite aucune question supplémentaire particulière à laquelle, prétendument, elle naurait pas répondue » (Canadian Complainant's Brief [Mémoire de la partie plaignante canadienne], à la p. 25).

Pour décider si, si cétait bien le cas, lITA avait compris que la réponse de Wolverine était insuffisante, il est important de se pencher sur les prétentions de lITA sur ce point. à la page 34 de son Mémoire donné en Réplique, lITA écrit :

[TRADUCTION]

La présence de valeurs nulles au titre de la production dans le cas de certaines données semestrielles ne compromettait pas les résultats de la valeur des coûts calculés par Wolverine. Ces soi-disant valeurs manquantes correspondaient uniquement aux données semestrielles particulières à certains CONNUM pour les semestres pour lesquels le Département du Commerce nutilisait pas de ventes sur le marché intérieur comme étalons. En outre, le Département du Commerce sest assuré que les valeurs nulles de production pour la période donnée représentaient de véritables périodes où il ny avait pas eu de production. Ainsi, bien que la présence de ce que lordinateur considérait comme étant des valeurs manquantes était déconcertante, elle nempêchait pas, en fait, la fonction test des coûts de fonctionner ni ne compromettait les résultats du test des coûts... Comme tous les faits nécessaires au calcul dun coût moyen pondéré exact pour le marché intérieur étalon étaient, en fait, donnés, le recours par le Département du Commerce à la moyenne simple était une « solution » qui ne comportait aucun problème sous-jacent réel (italiques ajoutés).

Aussi, lITA dit que le recours à la moyenne simple nétait pas exigé par la disposition sur « les faits connus ». 1 Elle note :

[TRADUCTION]

Même si lon présume, pour les besoins de la cause, que la demande du Département du Commerce, faite à Wolverine, de fournir une « moyenne pondérée » unique était suffisamment claire pour que lomission par Wolverine de calculer sa propre moyenne annuelle pour ses données au titre du CP constitue un refus de fournir linformation demandée, labsence dune telle moyenne annuelle dans la base de données versée au dossier na pas « obligé » à utiliser une moyenne simple. Elle a seulement obligé le Département du Commerce à calculer lui-même la moyenne pondérée en fonction des données fournies, qui étaient adéquates à cette fin.

Pour les raisons suivantes, le Groupe spécial juge que lITA na pas violé le § 1677(m)(d) du 19 USC. Cette disposition du Tarif Act codifié, le § 1677(m) du 19 USC, traite de la tenue des enquêtes et des examens administratifs. Plus précisément, le § 1677(m)(d) traite de linsuffisance des données fournies ; il porte :

[TRADUCTION]

Si lautorité administrante... constate quune réponse à une demande dinformation faite sur le fondement du présent sous-titre nest pas conforme à la demande faite, elle... informe promptement lauteur de la réponse de la nature de la déficience et, dans la mesure où cela lui est possible, elle lui fournit la possibilité dy remédier ou de lexpliquer, compte tenu des délais impartis aux enquêtes ou aux examens prévus au présent sous-titre. Si lauteur fournit dautres informations en réponse au sujet de la déficience et que :

  1. lautorité administrante... constate que cette réponse nest pas satisfaisante ;
  2. ou que cette réponse nest pas fournie dans les délais impartis ;

lautorité administrante... peut, sous réserve de lalinéa e) du présent article, ne pas tenir compte, en tout ou en partie, des réponses initiales ou subséquentes.

Ainsi, le § 1677(m)(d) autorisait lITA à ne pas tenir compte, en tout ou en partie, des réponses initiales ou subséquentes de Wolverine uniquement si elle avait déjà informé cette dernière de la nature de la déficience et, dans la mesure où cela lui était possible, lui avait offert la possibilité dy remédier ou de lexpliquer. Si les informations ultérieures navaient pas été satisfaisantes, ou avaient été fournies passés les délais impartis, lITA aurait pu ne pas tenir compte des informations fournies par Wolverine [sous réserve des conditions fixées par le § 1677(m)(e)]. En somme, il est clair que le §1677(m)(d) exigeait la notification dune réponse déficiente, et la possibilité raisonnable de la corriger, avant que lITA puisse ne pas tenir compte de linformation fournie par Wolverine. Ainsi la question à laquelle il faut répondre est de savoir si lITA a constaté que la réponse de Wolverine était insuffisante et, en ce cas, si elle a donné à Wolverine la possibilité de la clarifier.

Si Wolverine a raison lorsquelle prétend que lITA a eu tort de ne pas laviser de ses raisons pour avoir calculé un simple CP moyen, elle ne peut se fonder sur les dispositions du § 1677(m)(d) pour obtenir un renvoi. Par cette disposition, lon a voulu traiter du dépôt effectif dobservations par Wolverine, non dun usage erroné par lITA de données fournies et vérifiées. En outre, il ny a pas de preuves concluantes quà lépoque en cause lITA nait pas informé Wolverine des déficiences quelle croyait constater dans les données quelle avait fournies. Mieux, il ny a rien dans le dossier de linstance, semble-t-il, qui montre que les données fournies par Wolverine aient été jugées par lITA, avant le 24 juin, comme étant déficientes.

Qui plus est, le mémoire du 24 juin, même sil pouvait être versé au dossier de linstance présente (ce que le Groupe spécial ne se croit pas en droit de faire), de laveu même de Wolverine, ne dit pas expressément que certaines des données quelle a fournies sont erronées. LITA, en linstance présente, a adopté comme position que les données fournies par Wolverine permettaient détablir une moyenne pondérée, et que, par conséquent, elles nétaient nullement déficientes. Il sensuit quil nest pas certain, à tout le moins, que lITA ait manqué aux obligations légales applicables.

En résumé, lacte de lITA aurait pu tomber sous le coup du § 1677(m)(d) du 19 USC, selon ses critères, si le vice présumé de linformation fournie par Wolverine avait été porté à lattention de cette dernière. Il ne la pas été. LITA a agi, tout simplement, en prenant pour acquis que, par inadvertance, une erreur sétait glissée dans les données de Wolverine. LITA na pas, non plus, expliqué ce quelle avait fait. Wolverine ne fut à aucun moment informée des mesures prises par lITA avant lintroduction de la présente instance.

Lindustrie américaine a soutenu quil fallait présumer que Wolverine aurait dû savoir ce que lITA avait fait. Cette affirmation a été fondée uniquement sur le fait que le programme informatique utilisé par lITA, étudié par un informaticien compétent et attentif, aurait révélé ce que lITA avait fait. Lindustrie américaine a fait valoir quun examen indépendant du logiciel de lITA par un expert en informatique était une mesure normale qui était prise dans une affaire dantidumping dont lITA était saisie. La notion de la connaissance présumée, compte tenu tout particulièrement de la norme générale de léquité procédurale, ne peut être étirée au point dy inclure une notification enfouie dans le langage dun logiciel informatique.

La décision du juge en chef Carman, dans laffaire Sugiyama Chain Co., Ltd. v. United States, 797 F. Supp. 989 (CIT 1992) est applicable. Dans cette affaire, lITA avait fait une erreur dans son programme informatique qui avait faussé le calcul du dumping. Au cours de linstance, lITA avait mal décrit, comme en lespèce, son mode de calcul. Après avoir rejeté [TRADUCTION] « du revers de la main » la défense dépuisement des recours opposée par lITA comme étant [TRADUCTION] « guère ingénieuse vue les circonstances », la Cour jugea que [TRADUCTION] « la méthodologie [informatique] exposée [par lITA] nest pas défendable ; le renvoi doit être ordonné ». La Cour convint, daccord avec lITA, que ce quelle aurait dû faire, caurait dû être [TRADUCTION] « dexaminer [les calculs] ; motiver les mesures quelle avait prise et, sil le fallait, faire les corrections nécessaires aux instructions de son programme informatique », 797 F.Supp., à la p. 997.

Enfin, les mesures prises par lITA qui forment la substance qui fonde la plainte de Wolverine, à savoir lomission de lui donner une explication en temps opportun sur la façon dont elle se servait de linformation reçue, étayent lallégation générale que cette dernière na pas été traitée équitablement. Comme on la observé, même sil était vrai quun expert en informatique aurait pu discerner le changement de méthodologie de lITA par une analyse du langage du logiciel de la Décision préliminaire, cela ne suffit pas pour quil y ait exécution, par lITA, de son obligation dinformer Wolverine de son mode de traitement de linformation fournie et, en particulier, que, dans son évaluation, elle allait sécarter de son mode normal de calcul. Voir lanalyse infra, à la p. 39.

(2) LITA a-t-elle violé le § 1677(e)(b) du 19 USC et fait illicitement une déduction préjudiciable à Wolverine ?

Wolverine a également prétendu que lITA avait fait illicitement une déduction préjudiciable à ses intérêts. Plus précisément, larticle 776 (b) du Tariff Act of 1930, ou le § 1677(e)(b) du 19 U.S.C., porte :

[TRADUCTION]

Si lautorité administrante... constate quune partie intéressée na pas coopéré en ne sétant pas conformé, au mieux de ses capacités, à une demande dinformation quelle lui a faite... elle peut, pour arriver à la décision applicable en vertu du présent sous-titre, avoir recours à une déduction préjudiciable aux intérêts de cette partie pour opérer une sélection dans les faits qui lui sont connus. Cette déduction préjudiciable peut être faite notamment sur le fondement dinformations tirée de :

  1. La requête ;
  2. Une décision définitive au regard de lenquête ouverte en vertu du présent sous-titre ;
  3. Tout examen antérieur fait en vertu de larticle 1675 du présent titre ou toute décision rendue en vertu de larticle 1675b du même titre ;
  4. Toute autre information versée au dossier.

Wolverine cite laffaire Olympic Adhesives, Inc. v. United States, une décision de la Cour fédérale de Circuit, où il a été jugé que, pour pallier le risque dune déduction préjudiciable pour manque de coopération, la partie intimée [TRADUCTION] « na quà fournir des réponses complètes aux questions posées dans une demande dinformation ».

Lindustrie américaine conteste même la prétention de Wolverine que lITA a fait une déduction qui lui était préjudiciable. En lespèce, fait valoir lindustrie américaine, lITA ne sest pas fondée sur des informations dune autre source ; par conséquent elle na pas eu recours à une déduction préjudiciable à Wolverine aux termes de la loi. En fait, lITA a utilisé linformation même concernant les coûts que lui avait fourni Wolverine, malgré que celle-ci ne lui ait pas fourni cette information dans la forme quelle lui avait demandé. En somme, lindustrie américaine fait valoir que rien, absolument rien, nindique que lITA entendait se fonder sur des faits préjudiciables à Wolverine lorsquelle a contracté les données sur les coûts.

Pour sa part, lITA expose ainsi sa position 1 :

[TRADUCTION]

Le Département ne peut se prévaloir dune déduction préjudiciable dans le choix des faits qui sont à sa disposition que sil a constaté que la partie na pas coopéré au cours de linstance. Le Département du Commerce na fait aucune constatation de ce genre au cours du présent examen. Ainsi, comme le Département disposait de toutes les données dont il avait besoin pour calculer un coût de production moyen pondéré et comme rien ne lui permettait de ne pas tenir compte des données fournies par Wolverine sur sa production, cest à tort quil a calculé, en lieu et place, la moyenne simple.

Il ressort clairement, à lexamen du dossier, que lITA na pas déclaré avoir constaté, comme lexige le § 1677(e)(b), que Wolverine navait pas coopéré en ne sétant pas conformé, au mieux de ses capacités, à une demande dinformation de lautorité administrante. Mais, présumément, cela est dû au fait que lITA nentendait nullement déclarer avoir fait une constatation préjudiciable aux intérêts de Wolverine et que, de lavis du Groupe spécial, elle ne la pas fait. Ce quelle a fait, ce fut dutiliser une méthodologie qui a mené à un résultat préjudiciable à Wolverine en lespèce, mais ce faisant, elle na fait aucune déduction préjudiciable aux intérêts de Wolverine en opérant une sélection dans les faits qui lui étaient connus. Rien ne prouve que lITA ait voulu ce résultat préjudiciable. Dailleurs, lorsque lITA a utilisé cette méthodologie une première fois, pour les Résultats préliminaires, avant de contracter les données, le résultat na pas été préjudiciable à Wolverine.

Par conséquent le Groupe spécial juge que lITA, nayant pas fait une déduction préjudiciable aux intérêts de Wolverine, na pas enfreint le § 1677(e)(b) du 19 USC.

(3) LITA a-t-elle omis dutiliser les données fournies par Wolverine sur ses coûts de production en violation du § 1677(m)(e) du 19 USC ?

Le Tariff Act (19 USC § 1677(m)(e)) interdit à lITA de refuser de tenir compte de linformation fournie par une partie nécessaire, entre autre chose, à une décision, pourvu que cette information ait été fournie en temps voulu, soit vérifiable et soit utilisable sans trop de difficultés.

La loi porte :

[TRADUCTION]

Pour parvenir à sa décision... lautorité administrante... ne doit pas refuser de tenir compte de linformation fournie par une partie intéressée nécessaire à la décision qui nest pas conforme aux conditions applicables quelle a posées... si :

  1. Linformation est fournie dans le délai imparti à son égard ;
  2. Elle est vérifiable ;
  3. Elle nest pas incomplète au point de ne pouvoir servir de fondement digne de foi à la décision applicable;
  4. La partie intéressée a fait la preuve quelle sest efforcée, au mieux de ses capacités, de fournir linformation et de se conformer aux conditions posées par lautorité administrante... au regard de cette information ;
  5. Et que linformation est utilisable sans trop de difficultés (19 USC § 1677(m)(e).

Lindustrie américaine fait valoir que les calculs de lITA, sans pondération de la quantité produite, étaient raisonnables dans les circonstances et quils ont donné des coûts de production légalement soutenables. Elle ne conteste pas vraiment quutiliser un coût de production moyen pondéré serait indiqué, ni nest-il sérieusement débattu que lITA avait commencé par rechercher une moyenne pondérée. Néanmoins lon soutient que les données fournies par Wolverine étaient tellement faussées que lITA a été justifié de les écarter.

En premier lieu, lon prétend quune valeur pour un CONNUM qui navait pas été produit durant une période donnée ne peut être calculée parce que tout dénominateur nul donne un CP nul. En second lieu, le recours à une période de vente « créneau » donne des coûts de production inutilisables. Enfin, à plusieurs égards, lexactitude des données fournies par Wolverine en réponse au questionnaire est mise en doute à plusieurs égards. Il sensuit, soutient lindustrie américaine, que lITA était justifiée de recourir à une autre méthodologie, donc à ne pas pondérer les données. Elle cite divers exemples où lITA sest servie du CP moyen simple plutôt que dune moyenne pondérée et la justifié.

LITA adopte comme position que lusage, pour elle, est de calculer un CP moyen pondéré et que rien, en lespèce, exigeait que lon sécarte de cet usage. À la vérité (comme il est montré plus loin), ce fut une erreur que dutiliser la moyenne simple alors que rien ne lexigeait. Les pondérées adoucissent les fluctuations des coûts de production, qui peuvent varier dun semestre à lautre, et, ainsi, elles dressent un portrait exact des coûts annuels généraux. 1 Lon fait observer quelle avait elle-même demandé une moyenne pondérée et quau cours de linstance lindustrie américaine avait reconnu que cétait dune moyenne pondérée don il fallait faire le calcul. Des exemples sont donnés de circonstances exceptionnelles ayant forcé, par le passé, lITA à recourir à des moyennes simples. Lon a fait valoir, par conséquent, que lutilisation de la moyenne simple nétait pas justifié et que les données fournies en lespèce permettaient le calcul dune moyenne pondérée. Ni dans son mémoire ni au cours des débats lITA na dit, ni tenté dexpliquer, pourquoi elle avait calculé une seule moyenne « simple ».

Wolverine soutient que, comme ses données avaient été vérifiées, rien ne justifiait lITA de ne pas tenir compte des coûts de production quelle avait fournis et de calculer la moyenne simple. Elle prétend quau cours de la vérification, lITA a bel et bien vérifié le CP réclamé pour, à tout le moins, un CONNUM qui navait pas été produit durant la période pour laquelle la vérification était faite. En outre, Wolverine conteste quune utilisation conforme du programme informatique ait donné des résultats comportant des signaux derreurs. De plus, en vertu du droit prétorien,2 et comme lexige larticle 1677m(e), si lITA avait éprouvé des difficultés à faire passer le programme, elle était obligé, avant décarter ses données, de linformer et de lui offrir la possibilité dexpliquer comment il se faisait que des signaux derreur apparaissaient. Même si elle avait fait erreur en fournissant des données semestrielles, le Département du Commerce ne sy était jamais formellement opposé et, de toute façon, il aurait pu facilement calculer les moyennes pondérées annuelles régulières.

Une chose est claire en lespèce. Une erreur a été faite. Toutes les parties intéressées avaient demandé une moyenne pondérée et présumé que ce serait elle qui serait calculée. Le problème que pose la thèse de lindustrie américaine, cest que lITA na pas intentionnellement rejeté les données de Wolverine, ni volontairement eu recours à une méthodologie différente. Il est vrai, néanmoins, que Wolverine aurait pu éviter le problème en fournissant une moyenne pondérée en réponse à la demande de lITA.

Lon a fait observer que lITA avait demandé à Wolverine de lui fournir un coût de production moyen pondéré. Plus précisément, en rejetant les catégories de production de Wolverine distinguant entre les feuilles et les rubans, lITA avait donné instruction à Wolverine de contracter les deux en un seul CONNUM, et de fournir une seule moyenne pondérée pour la catégorie. Dans ce contexte, pense lITA, Wolverine peut avoir continué de fournir des informations semestrielles parce quelle sest attardé surtout à la première partie de la demande (contracter les deux codes de produits) et non à la seconde. à la vérité (contrairement à sa position présente), lindustrie américaine, après la décision préliminaire, a elle aussi demandé à lITA dexiger que Wolverine contracte les deux codes de produits, et quelle fournisse un CP annuel pondéré.

Si lITA avait consciemment voulu sécarter de son usage habituel dutilisation de moyennes pondérées, le problème se poserait différemment. Dans ce cas, lITA aurait sans doute expliqué pourquoi elle le faisait.

Quil y ait eu des déficiences dans les données fournies par Wolverine ayant pu justifier le rejet par lITA de ces données nest pas ce qui est en cause. Le dossier confirme que lITA voulait utiliser les données fournies, quelle avait vérifiées à sa satisfaction. Le Groupe spécial ne révisera pas les constatations de lITA.

Le Groupe spécial conclut que les mesures prises par lITA nétaient pas raisonnables. Dans la mesure où la suppression du programme de la ligne PRODQTY était basée sur la notion erronée que Wolverine navait pas signalé certaines ventes, cétait aller à lencontre des preuves vérifiées. Quoi quil en soit, les « signaux derreur » allégués auraient du amener lITA à ouvrir une enquête et à rechercher auprès de Wolverine quelle était la source des erreurs, comme lexige larticle 1677m(e). Le résultat nétait donc pas soutenu par une preuve substantielle. Larticle 1677m(e) dit que lITA doit se servir de linformation fournie par lintimée si elle a été fournie en temps voulu, a été vérifiée et est utilisable sans trop de difficultés. Combien de difficultés font quon éprouve « trop de difficultés » est, bien entendu, dordre subjectif. Mais, comme les données de Wolverine ont été vérifiées à la satisfaction de lITA, la barre justifiant quon ait été fondé de ne pas communiquer avec Wolverine doit être placée haut.

Si la prétention de Wolverine : quelle était en mesure de passer le programme sans aucune difficulté, est vraie, il aurait dû être facile, semble-t-il, de rectifier le problème.

Le Groupe spécial conclut que lITA ne sest pas conformé au § 1677(m)(e) du 19 USC, ayant refusé de tenir compte dune information fournie par Wolverine en temps voulue, vérifiée et utilisable sans trop de difficultés. En conséquence, les Résultats définitifs ne sont pas confirmés sur ce point.

(4) En calculant la moyenne simple du coût du production, lAutorité investigatrice na pas non plus suivi lusage administratif quelle avait établi

Wolverine conteste également la décision de lITA de calculer le coût de production moyen simple, disant quainsi linstance administrative a violé lusage quelle avait établi. 3 LITA reconnaît que [TRADUCTION] « lusage habituel » quelle suivait était dutiliser des coûts moyens pondérés annuels pour établir le CP et elle prétend quelle avait initialement eu lintention de se conformer à cet usage au cours de lexamen en cause également. 4

Lindustrie américaine fait valoir que lITA [TRADUCTION] « aurait pu recourir à toutes sortes dautres méthodologies quune moyenne pondérée ». 5 Elle cite de nombreuses autres décisions en matière dantidumping où lITA a dailleurs recouru à la moyenne simple, plutôt quà une moyenne pondérée. 6

LITA et Wolverine font valoir que, dans les cas antérieurs où lITA a dû recourir à la moyenne simple, elle la fait soit parce que des circonstances particulières avaient fait quun recours à la moyenne simple était plus précis, soit parce que les données nécessaires à une pondération avaient manqué. 7 Lindustrie américaine prétend que les données fournies par Wolverine en lespèce, dont les quantités produites durant les périodes créneaux, étaient inutilisables pour le calcul dune moyenne pondérée exacte. Cest, prétend-on, ce qui a obligé à recourir à une autre méthodologie, comme la moyenne simple.

Comme il a déjà été dit, lITA et lindustrie américaine reconnaissent toutes les deux que la moyenne qui fut en fin de compte utilisée par le Département ne fut ni purement la simple moyenne ni une moyenne pondérée, mais, en fait, la « simple » moyenne de données semestrielles pondérées. 8 Wolverine sétait déjà servie des quantités expédiées pour pondérer les coûts fournis. De même, les coûts de la matière brute fournis avaient été pondérés par Wolverine.

Cest lABC du droit quune instance administrative ne peut sécarter de sa politique établie : [TRADUCTION] « Lopinion dominante, en droit, tient quune instance administrative doit soit se conformer à ses propres précédents, soit expliquer pourquoi elle sen écarte » (Davis, K. & Pierce, R., II Administrative Law Treatise, § 11.5, aux pp. 206-07, 3e éd., 1994 (et jurisprudence citée)). Voir aussi, p.ex., les affaires Atchison, Topeka & Sante Fe R. Co. v. Wichita Bd. of Trade, 412 U.S. 800, 808 (1973) : linstance administrative a [TRADUCTION] « lobligation dexpliquer pourquoi elle sécarte de ses normes antérieures » ; et Greater Boston Television Corp. v. FCC, 44 F.2d 841, 852 (D.C. Cir.) demande de certiorari rejetée : 403 U.S. 923 (1971). En matière dantidumping, la CCI a jugé que [TRADUCTION] « le Département du Commerce peut changer sa position pourvu quil explique les raisons de ce changement et que lexplication donnée soit en accord avec la loi et soutenue par une preuve substantielle » : Cultivos Miramonte S.A. v. United States, 980 F. Supp. 1268, 1274 & n. 6 (CIT, 1997) (omission des notes). 9

Lusage établi suivi par lITA a été de calculer le CP en fonction dune moyenne pondérée et non de la simple moyenne des coûts. Voir, p.ex., laffaire Certain Welded Carbon Steel Pipe and Tube from Turkey, 61 Fed. Reg. 69067, 69075 (31 décembre 1996) : [TRADUCTION] « Lusage habituel du Département, cest de calculer les coûts moyens pondérés de production ».

En outre, la moyenne pondérée, normalement, est calculée en fonction de la période de vente applicable, laquelle, dordinaire, est lannée qui fait lobjet de lexamen administratif. La raison pour laquelle une moyenne pondérée est utilisée, cest que lutilisation de la moyenne simple tend à produire un CP déformé sil survient des fluctuations dans les coûts. Voir laffaire Fujitsu General Ltd. v. United States, 883 F. Supp. 728, 735 (CIT, 1995) : [TRADUCTION] « Les fluctuations aléatoires du CP... sont précisément ce qui justifie la préférence du Département du Commerce pour lutilisation dun CP annuel moyen pondéré ».

De lavis du Groupe spécial, lusage établi à lITA a été dutiliser une moyenne pondérée lorsque cela était possible pour le calcul du CP. Lorsque ce nétait pas possible, lITA a, à loccasion, utilisé de simples moyennes au lieu de moyennes pondérées. Toutefois lorsquelle a eu recours à des moyennes simples, comme lors des décisions citées par lindustrie américaine, elle la fait en donnant une explication pertinente.

Nous convenons avec lITA et Wolverine que ces cas antérieurs, cités par lindustrie américaine, constituaient des exceptions à la règle. Dans plusieurs de ces affaires, ainsi dans laffaire Fresh and Chilled Atlantic Salmon from Norway, 56 Fed. Reg. 7661, 7666, 7672 (du 25 février 1991), la moyenne simple était plus précise étant donné le nombre de répondants ou de conditions du marché. Dans quelques-uns des autres cas, il est vrai, comme laffirme lindustrie américaine, quon avait pas fourni suffisamment de données pour permettre à lITA dutiliser une moyenne pondérée : p. ex., Silicon Metal from Brazil, 62 Fed. Reg. 42759, 42761 (8 août 1997).

Mais un examen des décisions citées par lindustrie américaine montre que, même lorsque les données nécessaires navaient pas été fournies et que lITA avait eu recours à la simple moyenne, celle-ci a toujours expliqué pourquoi elle le faisait. Donc, indépendamment de la question dun usage raisonnable par lITA de la simple moyenne pour cause de données prétendues inutilisables en lespèce, la question fondamentale qui se pose reste à savoir si elle a expliqué pourquoi elle sest écarté de lusage, bien établi, quelle avait suivi antérieurement. Même si les données de Wolverine avaient vraiment été inutilisables et que, comme dans certains des cas antérieurs, les données nécessaires navaient pas été fournies, lITA na donné aucune explication dans ses résultats définitifs disant pourquoi elle sétait écarté de lusage quelle avait établi.

Si nétait en cause que cet aspect du litige, nous ne renverrions laffaire à lITA que pour quelle explique pourquoi elle a calculé un CP en recourant à la « simple » moyenne plutôt quà une moyenne pondérée en lespèce, sans suivre lusage quelle avait établi. Ce vice fondamental dun écart inexpliqué par rapport à lusage établi par linstance administrative doit être, toutefois, subsumé dans le renvoi général.

Par conséquent, anticipant cela, il est plus indiqué en lespèce de conclure quil vaut mieux ordonner un renvoi à lITA aux fins de la question du calcul, de telle sorte que, comme il est proposé dans laffaire Sugiyama, elle puisse [TRADUCTION] « létudier, donner les raisons des mesures prises et, si nécessaire, apporter les corrections nécessaires aux instructions du programme informatique » : comparez avec laffaire Sugiyama Chain Co., Ltd. v. U.S., 797 F. Supp at 997 (CIT 1992).

 

Suite de cette Décision du Groupe Spécial


1 ITA Sales Verification Outline/Report [Rapport-Aperçu de l’ITA sur la vérification des ventes], à la p. 3 (sans date)(Admin. Rec. Non-Pub. 32/66/24) et Cost Verification Report [ Rapport de vérification des coûts], 5-6 (sans date)(Admin. Rec. 32/54/23).
[Revenez au texte]

2 Memorandum from Paul Stolz to Holly Kuga [Note de Paul Stolz à Holly Kuga], à la p. 3, daté du 24 juin 1998, Admin. Rec. Non-Pub. 35/36/34.
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3 Ce que l’ITA qualifie de moyenne « simple », l’industrie américaine le qualifie de « coût moyen pondéré hybride ». C’est que, comme l’un et l’autre le reconnaissent, la moyenne « simple » calculée par l’ITA était, pour être précis, la moyenne ordinaire de la moyenne pondérée des données semestrielles sur les coûts de Wolverine. Un élément de pondération était donc présent, mais nullement de l’importance de la pondération à laquelle l’ITA avait traditionnellement recours dans le calcul d’une moyenne pondérée.
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1 Ibid., à la p. 39.
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1 Article 57 (2), Response Brief [Mémoire de la Réplique], à la p. 40.
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1 Arrêt Fujitsu General Ltd. v. United States, 883 F. Supp. 728 (CIT 1995).
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2 Arrêt Borden, Inc. v. United States, 4 F. Supp. 2d at 1246 (CIT 1998).
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3 Canadian Complainant's Brief [Mémoire de la partie plaignante canadienne] aux pp. 34-35.
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4 Article 57 (2), Response Brief of the Investigating Authority [Mémoire de la Réplique de l’Autorité investigatrice], aux pp. 24-25.
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5 Case Brief of the U.S. Industry [Mémoire de l’industrie américaine], à la p. 37.
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6 Ibid., aux pp. 37-39.
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7 Canadian Complainant's Brief, [Mémoire de la partie plaignante canadienne] notes 87 et 88, à la p. 34 ; Rule 57(2) Response Brief of the Investigating Authority, [article 57 (2), Mémoire de la Réplique de l’Autorité investigatrice] aux pp. 22 à 34.
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8 Response Brief of the Investigating Authority, [Mémoire de la Réplique de l’Autorité investigatrice], note 13 et Case Brief of the U.S. Industry, [Mémoire de l’industrie américaine] aux pp. 9-10.
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9 Voir aussi les affaires Citrosuco Paulista, S.A. v. United States, 704 F. Supp. 1075, 1088 (CIT, 1998) et Hussey Copper Ltd. v. United States, 17 CIT 993, 997, 834 F. Supp. 413, 418 (CIT, 1993) : cette règle a pour but [TRADUCTION] « d’assurer la cohérence de l’application de la législation par l’instance administrative ».
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