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EXAMEN PAR UN GROUPE SPÉCIAL AUX TERMES DE L'ACCORD DE LIBRE-ÉCHANGE ENTRE CANADA ET LES ÉTATS-UNIS


Article 1807
Dossier du Secréetariat
XXX-99-9999-99
(Suite)

2. L'article XXg)

5.03 Les États-Unis affirment que l'obligation de débarquement du Canada ne répond à aucun objectif utile en matière de conservation et qu'elle ne peut donc être considérée comme �visant principalement� la conservation des stocks de hareng et de saumon, comme l'exige l'Article XXg) tel qu'interprété par le Groupe spécial du GATT sur le Canada - Mesures affectant l'exportation de harengs et de saumons non transformés. De l'avis des États-Unis, le contexte dans lequel l'obligation de débarquement a été établie et l'application de cette obligation aux stocks de saumon coho, chum et quinnat qui n'étaient auparavant soumis à aucune restriction, démontrent que l'obligation de débarquement n'a aucune raison d'être scientifique. Le fait que le Canada ait rejeté les propositions américaines de fournir les renseignements sur les débarquements en faisant appel à d'autres méthodes moins restrictives sur le plan commercial, constitue, à leur avis, une autre indication que l'obligation de débarquement n'a pas de véritable objectif de conservation. Les États-Unis soutiennent aussi que l'argument de collecte des données invoqué par le Canada a été rejeté par le Groupe spécial du GATT et que ce rejet s'applique aussi en l'occurrence, que le Canada compte sur les données que lui fournissent les États-Unis en vertu de la Convention du saumon du Pacifique et sur les données qu'il échange avec les États-Unis au sujet d'autres pêches, et que le Canada, de toute façon, n'a pas accès à 100 % des prises pour les fins de l'échantillonnage biologique, et qu'il n'en a pas besoin. Dans ces circonstances, selon les États-Unis, l'obligation de débarquement du Canada constitue une restriction déguisée au commerce international.

5.04 Le Canada soutient que, comme il s'agit d'un volet essentiel de sa stratégie de conservation du hareng et du saumon, l'obligation de débarquement �vise principalement� la conservation des stocks en question. Le Canada affirme tirer son droit de conserver et de gérer ses ressources de son statut d'État côtier que lui reconnaît le droit international de la mer contenu dans la Convention de 1982 sur le droit de la mer, et que le droit d'imposer le débarquement des prises est lié aux activités de conservation prévues à la Convention. Le Canada soutient qu'une obligation de débarquement fournit en fait les meilleurs renseignements possibles pour les fins de la conservation, car les données sont beaucoup plus précises que celles qui proviennent des �rapports radio�. Le débarquement obligatoire permet d'appliquer des mesures cohérentes de vérification et d'application de la loi et donne accès à 100 % des prises pour les fins de l'échantillonnage biologique. Le Canada n'est pas d'accord pour qu'on l'oblige à compter sur les États-Unis pour obtenir les données dont il a besoin pour ses programmes de conservation : il cite des cas précis où il n'a pu compter sur de telles données et soutient qu'il existe des obstacles pratiques à l'application de la loi lorsque des agents canadiens obtiennent les renseignements des États-Unis ou même réunissent les données sur place aux États-Unis.

VI. La Question De L'article Xi:1

6.01 L'Article XI:1 porte que :

Aucune partie contractante n'instituera ou ne maintiendra à l'importation d'un produit originaire du territoire d'une autre partie contractante, à l'exportation ou à la vente pour l'exportation d'un produit destiné au territoire d'une autre partie contractante, de prohibitions ou de restrictions autres que des droits de douanes, taxes ou autres impositions, que l'application en soit faite au moyen de contingents, de licences d'importation ou d'exportation ou de tout autre procédé.

6.02 Les États-Unis affirment qu'il faut interpréter l'Article XI:1 de façon simple et directe -- il interdit les �prohibitions ou restrictions� à �l'exportation ou à la vente pour l'exportation�. Ils affirment que, conformément aux décisions déjà rendues par le GATT10, il n'est pas nécessaire qu'une mesure se rapporte directement aux exportations. Pour tomber sous le coup de l'Article XI:1, il suffit qu'elle ait l'effet de restreindre les exportations. Les États-Unis prétendent que l'obligation de débarquement du Canada a l'effet d'imposer, sur les ventes à l'exportation de hareng et de saumon non transformés, des coûts que ne supportent pas la plupart des acheteurs canadiens et qu'elle impose par conséquent un désavantage compétitif à beaucoup d'acheteurs des États-Unis. Un tel désavantage compétitif constitue une �restriction� au sens de l'Article XI:1. D'après les États-Unis, même si l'obligation de débarquement pourrait aussi être considérée comme une restriction à l'�exportation�, elle constitue sans aucun doute une restriction à la �vente pour l'exportation� des produits en cause.

6.03 Le Canada soutient que l'Article XI:1 interdit les restrictions à l'�exportation� ou, pour reprendre la terminologie du Canada, à l'�acte d'exporter�. L'obligation de débarquement ne réglemente cependant pas l'acte d'exporter, car elle oblige à débarquer la totalité du poisson sans faire de distinction entre le poisson destiné aux acheteurs canadiens et celui qui est destiné à l'exportation. De l'avis du Canada, les décisions du GATT sur lesquelles s'appuient les États-Unis ne s'appliquent pas en l'occurrence parce qu'elles portent soit sur les importations, soit sur des mesures étroitement liées à un régime de licence d'exportation. Le Canada soutient de plus que l'Article XI:1 ne traite pas de mesures comme les obligations de débarquement. Si, d'après le Canada, on se sert des règles normales d'interprétation pour lire cet article, il faut comprendre �autres mesures� dont il est question dans l'article uniquement au sens de mesures semblables aux �contingents� ou aux �licences� qui sont spécifiés à l'Article XI:1. De plus, comme les acheteurs des États-Unis peuvent se procurer du hareng et du saumon non transformés aux mêmes conditions que les acheteurs canadiens, il n'y a alors pas de restriction à la �vente pour l'exportation� qui enfreigne l'Article XI:1. Enfin, le Canada soutient que l'obligation de débarquement ne constitue pas une restriction de fait du commerce parce que les États-Unis n'ont pas réussi à prouver qu'elle avait des répercussions sur le commerce.

6.04 Au cours des délibérations, le Groupe spécial a demandé aux Parties si la distinction entre les mesures à la frontière et les mesures internes, qui s'appliquent dans le cas des importations en vertu de l'Article XI.1,11 avait un rapport quelconque avec les exportations dont il est question dans cet article. Après avoir analysé les arguments des deux Parties sur la question, le Groupe spécial a conclu que la distinction entre les �mesures à la frontière� et les �mesures internes� ne s'appliquait pas aux restrictions à l'exportation mentionnées à l'Article XI:1. Tout d'abord, même s'il existe un parallèle évident entre le mot �importation� et le mot �exportation�, l'Article XI:1 n'utilise pas le mot �exportation� seul. Il y est question de �prohibitions ou restrictions... à l'exportation ou à la vente pour l'exportation d'un produit�. Ainsi, même si l'�exportation� devait désigner l'acte d'exporter à la frontière seulement, le concept de la �vente pour l'exportation� étend la portée de l'article XI:1 aux restrictions imposées à un stade moins avancé du processus, avant l'acte d'exportation même.

6.05 Deuxièmement, il y a une bonne raison pour laquelle le champ d'application de l'Article XI:1 est plus vaste dans le cas des exportations et qu'il ne s'applique pas dans le cas des importations. Les restrictions internes ou autres qu'à la frontière imposées sur les importations sont réglementées ailleurs dans le GATT en vertu de l'Article III. Cette disposition ne s'applique pas et serait difficile à appliquer aux exportations. Alors qu'une importation conserve sa nature distincte d'importation durant toute sa vie commerciale, et peut être identifiée comme telle, une exportation n'existe comme exportation que lorsqu'elle est engagée dans le processus d'exportation. De l'avis du Groupe spécial, le passage de l'Article XI:1 qui traite des restrictions à la �vente pour l'exportation� a été conçu en fonction de ce stade antérieur du processus et pour couvrir les restrictions imposées sur les biens destinés à l'exportation même si la restriction n'entre pas en vigueur à la frontière.12

6.06 Le Groupe spécial juge par conséquent injustifiée l'application de la distinction entre les �mesures à la frontière� et les �mesures internes� aux restrictions à l'exportation prévues à l'Article XI:1. La question dont était saisi le Groupe spécial était de savoir si l'obligation de débarquement constituait une restriction à la �vente pour l'exportation�, qu'il s'agisse d'une mesure interne ou d'une mesure à la frontière. Si l'on juge que l'obligation de débarquement constitue une restriction à la �vente à l'exportation�, il ne sera alors pas nécessaire de décider si elle constitue une restriction à l'�exportation�.

6.07 Quant à la portée du terme �restriction� en vertu de l'Article XI:1, le Groupe spécial n'est pas convaincu que les �autres mesures� contenues dans la définition soient limitées à un générique circonscrit par l'expression �contingents, licences d'importation ou d'exportation�. Le point commun entre ces mesures pourrait très bien être qu'elles constituent une restriction du commerce. De plus, une expression d'amplification introduite par le mot �que� affirme ordinairement la nature inclusive plutôt que limitée de l'expression. À cet égard, le Groupe spécial constate que la définition de �restriction� que l'on retrouve à l'article 410 de l'Accord de libre-échange, qui s'applique à la totalité du chapitre quatre et est par conséquent pertinente à l'interprétation de l'Article XI:1, étend la signification du mot restriction pour y inclure les �permis� et les �prescriptions de prix minimums�, ainsi que les contingents et les licences. De plus, les interprétations qu'a faites le GATT de l'Article XI:1 appuient une approche libérale13, car elles insistent sur le fait que l'article doit être interprété de façon assez générale pour pouvoir réaliser sa raison d'être fondamentale.14

6.08 Le Canada fait valoir que les seules mesures qui peuvent être considérées comme des �restrictions ...à la ... vente pour l'exportation� en vertu de l'Article XI:1 sont celles qui prévoient le traitement différent des ventes intérieures et des ventes à l'exportation. Le Groupe spécial constate qu'une telle approche limiterait considérablement la portée des obligations du GATT en matière d'exportation. Elle permettrait aux gouvernements d'appliquer des mesures qui imposeraient en fait des fardeaux commerciaux plus lourds sur les exportations que sur les produits intérieurs à condition seulement que la forme de la mesure même soit neutre. Le Groupe spécial note que les obligations parallèles du GATT qui ont trait aux importations dans les Articles III:2 et III:4 ne prévoient aucune limite de ce genre.

6.09 En analysant la position canadienne, le Groupe spécial constate que l'obligation de débarquement n'est pas simplement une mesure générale qui se trouve à avoir un impact défavorable sur les exportations. Il y a une raison importante pour laquelle il existe une règle précise concernant le débarquement au Canada de toutes les prises de saumon et de hareng (une règle aussi précise que les règles concernant l'inspection et la présentation de rapports). En effet, cette règle vise à faciliter la collecte des données sur les exportations et c'est, de fait, sa principale raison d'être. Le Groupe spécial conclut que toute mesure qui a pour effet principal de réglementer des transactions d'exportation, peut être considérée comme une restriction au sens de l'Article XI:1 si elle a pour effet d'imposer un fardeau commercial essentiellement plus lourd sur les exportations que sur les ventes intérieures. Le Groupe spécial estime cependant qu'il n'est pas nécessaire de démontrer les véritables effets d'une telle mesure sur le commerce. En pratique, aucune donnée ne peut servir à indiquer ce qui se serait produit si la mesure n'avait pas été appliquée et le GATT n'a pas exigé de telles preuves pour rendre ses décisions.15 Ce qu'il faut démontrer, c'est que la mesure a modifié la concurrence entre les acheteurs étrangers et les acheteurs intérieurs.

6.10 En ce qui concerne la situation concurrentielle désavantageuse liée à l'obligation de débarquement, les États-Unis se fondent sur le principe qu'une grande partie des exportations potentielles vers les États-Unis exigera l'application de mesures qui ne seront pas obligatoires dans le cas de ventes aux acheteurs canadiens. Les acheteurs canadiens pourront débarquer leurs prises à l'usine de transformation de leur choix ou à un endroit plus pratique pour l'usine en question. Les États-Unis ne nient pas que certains acheteurs à l'exportation pourraient trouver qu'il est financièrement avantageux de débarquer les prises au Canada et de les expédier par camion à leur point de destination. Le problème, c'est que les prises destinées à l'exportation doivent être débarquées au Canada que ce soit avantageux ou non sur le plan financier. Les États-Unis soutiennent que, pour bon nombre d'acheteurs, il serait avantageux sur le plan financier que les prises soient expédiées directement par bateau des secteurs de pêche vers des débarcadères américains; pour ces acheteurs, l'obligation de débarquement impose des frais supplémentaires liés au débarquement, au déchargement et au rechargement des prises à un débarcadère canadien.

6.11 Les membres du Groupe spécial sont d'accord pour dire que même si l'obligation de débarquement touche tant les acheteurs canadiens que les acheteurs américains, le fardeau imposé aux acheteurs à l'exportation qui doivent débarquer leurs prises contre leur gré est plus grand que le fardeau de l'inspection et de la présentation de rapports exigé de tous les acheteurs. De plus, même s'il n'existe aucune donnée réelle sur le pourcentage d'acheteurs à l'exportation qui auraient le plus avantage à expédier leurs prises directement par bateau, le Groupe spécial est d'avis que ce pourcentage serait élevé. C'est en fait le seul moyen de transport à la disposition des acheteurs à l'exportation de l'Alaska. Ceux de l'État de Washington peuvent choisir d'expédier leurs prises par camion, mais, même dans ce cas, il est fort probable qu'un fort pourcentage de prises soient expédiées directement par bateau. Si l'on en juge d'après la pratique canadienne en matière de débarquement dont a été saisi le Groupe spécial, une grande majorité d'acheteurs canadiens débarquent leurs prises directement à leurs usines de transformation.16 Rien ne laisse supposer qu'un pourcentage semblable d'acheteurs des États-Unis n'imiteraient pas leurs homologues canadiens.

6.12 Les deux Parties ont consacré une bonne partie de leur mémoire et de leur plaidoyer à essayer de prouver, dans le cas des États-Unis, la nature et l'importance des coûts supplémentaires imposés aux acheteurs américains et, dans celui du Canada, l'insignifiance des coûts. Aucune des deux Parties n'a réussi à faire la preuve des coûts réels que les acheteurs américains auraient à payer. En se basant tout simplement sur les mesures que les acheteurs auraient à prendre, c'est-à-dire le débarquement au Canada, le déchargement et le chargement en vue de la réexpédition vers les États-Unis, le Groupe spécial est convaincu que les coûts entrainés par l'obligation de débarquement seraient plus que minimes comparativement à l'option de l'expédition directe depuis les champs de pêche jusqu'à un débarcadère du poisson ou une usine de transformation aux États-Unis.17

6.13 En somme, bien qu'il soit difficile, d'après la preuve présentée, d'évaluer avec précision l'incidence de l'obligation de débarquement et bien qu'il soit évident que l'obligation de débarquement ne sera pas un fardeau financier pour certains acheteurs à l'exportation, le Groupe spécial est d'accord pour dire qu'un nombre considérable d'acheteurs à l'exportation potentiels pourraient réaliser de plus grandes économies en expédiant directement les prises par bateau et que, pour la plupart de ces acheteurs, les frais supplémentaires occasionnés par un débarquement non voulu seraient importants. Par conséquent, le Groupe spécial conclut que, dans sa forme actuelle, l'obligation de débarquement du Canada est une restriction à la vente pour l'exportation au sens de l'article XI.1 du GATT et, partant, de l'article 407 de l'Accord de libre-échange.

6.14 Un des membres du Groupe spécial juge insuffisante la preuve présentée pour appuyer la conclusion du Groupe spécial quant à l'importance du fardeau imposé par l'obligation de débarquement. Il est toutefois d'avis que, compte tenu de l'ensemble de la preuve présentée, l'obligation de débarquement est une restriction au sens de l'article XI:1. Un autre membre du Groupe spécial ne croyait pas que les règles en vigueur ou les décisions antérieures du GATT constituaient une base claire sur laquelle fonder un jugement en l'occurrence si l'obligation de débarquement constitue une restriction au sens de l'Article XI:1 et n'était pas prêt à prendre une décision sur cette question. Ce membre estime en outre que la question de la conformité des exigences en matière de débarquement avec les règles du GATT soulève certains points de fait que les parties contractantes du GATT pourraient vouloir étudier plus à fond.

VII. LA QUESTION DE L'ARTICLE Xxg)

1. Le critère juridique approprié

7.01 L'Article XXg) porte que �rien dans le présent Accord ne sera interprété comme empêchant l'adoption ou l'application par toute partie contractante des mesures

g) se rapportant à la conservation des ressources naturelles épuisables, si de telles mesures sont appliquées conjointement avec des restrictions à la production ou à la consommation nationales,

sous réserve que ces mesures de conservation

ne soient pas appliquées de façon à constituer soit un moyen de discrimination arbitraire ou injustifié entre les pays où les mêmes conditions existent, soit une restriction déguisée au commerce international.

Le Canada fait valoir que même si l'on juge que l'obligation de débarquement enfreint l'Article XI:1, elle est néanmoins permise par cette disposition. Les États-Unis ne sont pas d'accord.

7.02 Les Parties conviennent que, puisque l'Article XXg) constitue une exception aux obligations de l'Accord général, il incombe au Canada de prouver que cette disposition s'applique. Elles reconnaissent aussi que l'on a satisfait à plusieurs des critères de l'Article XXg) qui ne sont pas remis en question : 1) il est convenu que le poisson visé par l'obligation de débarquement constitue une �ressource naturelle épuisable� au sens de l'Article XXg); 2) il est convenu que les restrictions imposées par le Canada quant au volume des prises effectuées par les pêcheurs canadiens satisfont à l'exigence de l'alinéa g) qui limite la production nationale de la ressource en cause; 3) il est convenu que la première condition énoncée dans le préambule de l'Article XX n'est pas remise en question, car personne ne prétend que l'obligation de débarquement constitue une discrimination arbitraire ou injustifiable entre des pays étrangers.

7.03 Les Parties conviennent que les questions en litige sont les suivantes et qu'il faut établir

1) si l'obligation de débarquement satisfait à la condition énoncée dans l'alinéa g), soit qu'il doit s'agir d'une mesure �se rapportant à la conservation� des ressources naturelles épuisables en question; ou, au contraire,

2) si l'obligation de débarquement constitue une �restriction déguisée au commerce international� qui contrevient à la deuxième condition énoncée dans le préambule de l'Article XX.

7.04 Les Parties s'entendent aussi sur la signification générale des critères en cause. Elles acceptent toutes deux l'interprétation suivante fournie par le Groupe spécial du GATT dans son rapport de 1987 sur la compatibilité avec le GATT de l'ancienne prohibition d'exportation du Canada:

4.6 Le Groupe spécial a noté que certains alinéas de l'Article XX stipulent que la mesure doit être �nécessaire� ou �essentielle� à la réalisation de l'objectif de politiques visé ... tandis que l'alinéa g) traite seulement des mesures �se rapportant à� la conservation des ressources naturelles épuisables. En conséquence, semble-t-il, l'Article XXg) ne concerne pas seulement les mesures qui sont nécessaires ou essentielles à la conservation des ressources naturelles épuisables, mais aussi une gamme plus large de mesures. Toutefois, comme l'indique le préambule de l'Article XX, l'inclusion de l'Article XXg) dans l'Accord général n'avait pas pour objet d'élargir la portée de l'article à des mesures prises à des fins de politique commerciale, mais simplement d'assurer que les engagements pris au titre de l'Accord général n'empêchent pas l'application de politiques visant à la conservation de ressources naturelles épuisables. Aussi le Groupe spécial a-t-il conclu que, s'il n'était pas impératif qu'une mesure commerciale soit nécessaire ou essentielle pour la conservation d'une ressource naturelle épuisable, il fallait cependant que cette mesure vise principalement à la conservation d'une ressource naturelle épuisable pour qu'elle soit considérée comme �se rapportant à� la conservation au sens de l'Article XXg). De même, le Groupe spécial a estimé que l'expression �conjointement avec�, à l'Article XXg), devait être interprétée d'une façon à assurer que la portée des mesures pouvant être prises au titre de cette disposition corresponde à l'objet en vue duquel elle a été incluse dans l'Accord général. C'est pourquoi, de l'avis du Groupe spécial, une mesure commerciale ne pouvait être considérée comme appliquée �conjointement avec� des restrictions à la production que si elle visait principalement à donner effet à ces restrictions.18

Comme l'indique le texte cité, l'interdiction de restrictions �déguisées� du commerce international dont il est question dans le préambule de l'Article XX constitue essentiellement l'inverse de l'exigence de l'alinéa g) en vertu duquel les mesures de conservation qui entraînent des restrictions sur le commerce doivent en fait avoir un véritable objectif de conservation.

7.05 Le Groupe spécial a commencé par examiner le but et la signification de la conclusion du Groupe spécial du GATT qui a jugé que les mesures de l'Article XXg) doivent �viser principalement à� la conservation. Le Groupe spécial reconnaît que la raison d'être de l'Article XXg) est de faire en sorte que les dispositions du GATT n'empêchent pas les gouvernements de mettre en oeuvre leurs politiques de conservation. À cet égard, le Groupe spécial reconnaît que la conservation des ressources naturelles répond à certaines préoccupations plus générales concernant l'environnement qui reflètent des intérêts économiques et autres. Le Groupe spécial est conscient de la pertinence de telles préoccupations pour l'interprétation et l'application de l'Article XXg), et de la nécessité d'accorder aux gouvernements suffisamment de latitude pour leur permettre de mettre en oeuvre leurs politiques de conservation. L'Article XXg) ne visait pas à permettre aux intérêts commerciaux d'un pays de l'emporter sur les préoccupations légitimes d'un autre pays en matière d'environnement.

7.06 Toutefois, le Groupe spécial reconnaît aussi que pour atteindre son objectif général, il n'est pas nécessaire que l'Article XXg) exempte de l'interdiction toutes les mesures de promotion de la conservation. Les seules mesures que l'Article XXg) protège sont celles qui font partie d'un véritable programme de conservation. Le critère �qui vise principalement à� sert à déterminer si l'on a satisfait à cette condition.

7.07 De l'avis du Groupe spécial, il faudrait appliquer le critère �qui vise principalement à� aux qualités objectives de la mesure en cause. Une mesure comme l'obligation de débarquement du Canada pourrait avoir plusieurs effets, notamment à la fois favoriser la conservation et restreindre le commerce. Même dans ce cas, cela n'exclurait pas l'existence d'un objectif de conservation véritable. La mesure en question pourrait constituer un volet précieux d'un programme de conservation qu'il vaudrait la peine d'appliquer pour des raisons de conservation seulement. De l'avis du Groupe spécial, il s'agit là, en bout de ligne, de la raison d'être du critère. Si la mesure avait été adoptée pour des raisons de conservation seulement, l'Article XXg) aurait permis à un gouvernement de l'employer.

7.08 Pour appliquer ce critère, le Groupe spécial tient compte du fait qu'il doit examiner les facteurs objectifs qui interviennent dans une décision d'adopter une telle mesure, notamment les avantages qu'aurait la mesure même sur le plan de la conservation et le fait de savoir s'il existe une raison véritable de choisir la mesure en question plutôt que d'autres qui pourraient donner le même résultat. Étant donné aussi que les gouvernements n'adoptent pas de mesures de conservation à moins que les avantages pour la conservation ne justifient les coûts à payer, le Groupe spécial doit se pencher sur les coûts de la mesure -- tant ceux des ressources que ceux des inconvenients subis par les intérêts commerciaux et autres affectés par la mesure -- afin de décider si les avantages découlant de cette mesure auraient en effet entraînés son adoption.

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10 Les États-Unis citent le Programme de la CEE sur les prix minimums à l'importation, L/4687, IBDD, 25e supp., page 68; Restrictions quantitatives de la CEE sur les importations de certains produits de Hong Kong, L/5511, IBDD, 30e supp., page 129 et Japon - Commerce des semiconducteurs, L/6309.

11 La distinction a été appliquée dans le rapport du Groupe spécial intitulé Canada - Administration de la Loi sur l'examen de l'investissement étranger, L/5504, IBDD, 30e supp., page 140 (1984), à 5.13-5.14 (pp. 162-163). La distinction a aussi été reconnue et précisée dans une certaine mesure dans le rapport du Groupe spécial intitulé Importation, distribution et vente de boissons alcooliques par les régies provinciales du Canada, L/6304, (5 février 1988), à 4.23-4.26 (page 48).

12 À cet égard, même si aucune des deux Parties n'a soulevé l'argument, le Groupe spécial constate que le chapitre quatre de l'Accord de libre-échange, auquel on a incorporé l'Article XI, s'intitule �Mesures à la frontière�. Le Groupe spécial conclut toutefois que le titre n'a pas pour but fondamental de restreindre, pour les fins de l'Accord de libre-échange, la portée de l'application des dispositions du GATT incorporées au chapitre en question.

13 Un Groupe spécial du GATT a récemment interprété l'expression �autres mesures� comme étant assez large pour englober les mesures internes restrictives appliquées par un monopole commercial d'état : Importation, distribution et vente de boissons alcooliques par les régies provinciales du Canada, L/6304 (5 février 1988), para. 4.23-4.26.

14 Japon - Commerce des semiconducteurs, L/6309 (24 mars 1988), para. 104-106; Japon - Droits de douanes, taxes et pratiques d'étiquetage sur les vins et les boissons alcooliques importés, L/6216, IBDD, 34e supp., page 83 (1987), para. 5.11.

15 Japon - Droits de douanes, taxes et pratiques d'étiquetage sur les vins et les boissons alcooliques importés, L/6216, IBDD, 34e supp., page 83 (1987); États-Unis - Taxes sur le pétrole et certaines matières importées, L/6175, IBDD, 34e supp., page 136.

16 Voir Réponses canadiennes aux questions supplémentaires des membres du Groupe spécial sur le saumon et le hareng de la C.-B., 25 juillet 1989.

17 Les États-Unis font aussi valoir que la détérioration de la qualité du poisson causée par la manutention supplémentaire ainsi entraînée augmente les coûts pour les exportateurs américains. Le Canada soutient que les techniques modernes de manutention limitent ou suppriment toute perte de qualité attribuable à la manipulation. Même si une perte de qualité semble plausible dans certaines circonstances, le Groupe spécial ne juge pas bon de se prononcer sur la question qui n'a aucun effet sur sa décision.

18 Canada - Mesures affectant l'exportation de harengs et de saumons non préparés, L/6268 (20 novembre 1987), para. 4.6 (page 18). (L'expression �vise principalement à� n'est pas soulignée dans le texte original.)