OAS

EXAMEN PAR UN GROUPE SPÉCIAL BINATIONAL
AUX TERMES DE
L'ACCORD DE LIBRE ÉCHANGE NORD-AMÉRICAIN.

Article 1904


Dossier du Secrétariat
CDA-95-1904-04

Dans L'affaire de:

Une Décision Définitive de Dumping concernant
le sucre raffiné tiré de la canne à sucre
ou de la betterave sucrère sous forme de granules,
de liquide et de poudre, originaire ou exporté des
États-Unis d'Amérique.


Membres : Brian E. McGill, président
Jane C. Luxton
Leonard E. Santos
Leon E. Trakman
Wilhelmina K. Tyler

AVIS ET ORDONNANCE

9 octobre 1996


TABLE DES MATIÈRES

I. DÉCLARATION DE COMPÉTENCE

II. CHEMINEMENT ADMINISTRATIF DU LITIGE ET PROCÉDURES DEVANT LE GROUPE SPÉCIAL

III. QUESTIONS DONT LE GROUPE SPÉCIAL EST SAISI

IV. NORME D'EXAMEN

    A. Généralités

    B. Position des participants

    C. Décision du Groupe spécial

V. LE CONTEXTE DES OPÉRATIONS DE VENTE DE SAVANNAH

VI. DÉTERMINATION DE L'EXPORTATEUR

    A. Position des participants

    B. Décision du Groupe spécial

VII. CALCUL DU COÛT DE PRODUCTION

    A. Contexte législatif et décision de Revenu Canada

    B. Position des participants

    C. Décision du Groupe spécial


      1. Examen selon la norme du caractère raisonnable

      2. Rejet de la méthode de Savannah par Revenu Canada

      3. Caractère raisonnable de la détermination du coût de production faite par Revenu Canada quant aux intrants tirés des betteraves sucrières

      4. Renvoi de la décision de Revenu Canada au sujet du coût de production des intrants de stocks combinés

VIII. CARACTÈRE RAISONNABLE DE LA DÉTERMINATION DE REVENU CANADA QUANT À LA DATE DE VENTE

    A. Le contexte factuel et la décision de Revenu Canada

    B. Position des participants

    C. Décision du Groupe spécial

IX. CONCLUSION

INSTRUCTIONS DE RENVOI


I. DÉCLARATION DE COMPÉTENCE

Le présent examen par un Groupe spécial binational découle d'une plainte déposée par Savannah Foods & Industries, Inc. ("Savannah") le 18 décembre 1995 conformément à la Règle 39(1) des Règles de procédure des groupes spéciaux binationaux formés en vertu de l'article 1904 de l'Accord de libre-échange nord-américain ("ALENA") et à la partie II (article 77.15) de la Loi sur les mesures spéciales d'importation, L.R.C. (1985), ch. S-15, et ses modifications ("LSMI"). Savannah demande un renvoi de la décision définitive de dumping rendue par le sous-ministre du Revenu ("Revenu Canada") le 5 octobre 1995 au sujet du sucre raffiné tiré de la canne à sucre ou de la betterave sucrière sous forme de granules, de liquide et de poudre (les "marchandises en cause"), originaire ou exporté des États-Unis d'Amérique (dossier d'enquête n 4237-80-2) ("décision définitive"), dans la mesure où cette décision s'applique à Savannah.

II. CHEMINEMENT ADMINISTRATIF DU LITIGE ET PROCÉDURES DEVANT LE GROUPE SPÉCIAL

Le 10 février 1995, l'Institut canadien du sucre ("ICS"), association commerciale représentant les producteurs canadiens1 des marchandises en cause2 , a déposé une plainte concernant le dumping du sucre raffiné originaire des États-Unis et de certains autres pays. L'ICS a présenté une preuve de la baisse de rentabilité, de la diminution et de la suppression de la marge et des pertes de ventes pour démontrer l'existence d'un préjudice découlant d'importations inéquitables. Conformément au paragraphe 31(1) de la LMSI, Revenu Canada a ouvert une enquête à ce sujet le 17 mars 1995. Le 24 avril de la même année, la Sugar Beet Growers Association a déposé auprès de Revenu Canada une lettre appuyant la plainte déposée par l'ICS.

Le 5 octobre 1995, Revenu Canada a rendu une décision définitive de dumping au sujet des marchandises en cause exportées des États-Unis. Dans sa décision concernant le dumping, Revenu Canada a examiné toutes les exportations de marchandises en cause que Savannah a effectuées au Canada et a conclu que la marge de dumping applicable à ces exportations s'établissait à 44 %3 . Le 6 novembre 1995, le Tribunal canadien du commerce extérieur a rendu une conclusion définitive selon laquelle le dumping des marchandises en cause des États-Unis menaçait de causer un préjudice sensible à l'industrie canadienne de production de marchandises similaires.

Le 17 novembre 1995, Savannah a déposé auprès du Secrétariat canadien de l'ALENA une demande d'examen par un groupe spécial binational. Savannah a demandé au Groupe spécial de renvoyer la décision définitive de dumping au motif que Revenu Canada avait commis une erreur de fait ou de droit au sujet des questions suivantes : l'identité de l'exportateur, la méthode de calcul du coût de production et l'inclusion dans les comparaisons de prix d'envois faits en application d'un contrat conclu entre Savannah et ED&F Man Sugar Ltd. ("ED&F"), cliente canadienne.

Savannah a déposé un mémoire le 26 mars 1996. Revenu Canada et l'ICS ont déposé leur mémoire respectif le 27 mai 1996 et Savannah a déposé un mémoire de réponse le 11 juin 1996. Au cours de l'audience tenue devant le Groupe spécial à Ottawa (Canada) le 10 juillet 1996, le bureau du procureur général du Canada représentant Revenu Canada, l'ICS et Savannah ont présenté des plaidoiries.

III. QUESTIONS DONT LE GROUPE SPÉCIAL EST SAISI

A. Savannah demande au Groupe spécial d'examiner la décision que Revenu Canada a rendue au sujet de l'identité de l'"exportateur" visé par l'enquête en appliquant la norme de la "décision correcte" ou, subsidiairement, de la "décision raisonnable". Elle soutient que, au regard de l'une ou l'autre de ces normes, la décision de Revenu Canada selon laquelle Michigan Sugar Company était un exportateur visé par l'enquête n'était pas défendable.

B. Savannah demande au Groupe spécial d'examiner la décision de Revenu Canada concernant le coût de production en appliquant la norme de la "décision correcte" ou, subsidiairement, de la "décision raisonnable". Elle soutient que, au regard de l'une ou l'autre de ces normes, la méthode de calcul du coût de production de Revenu Canada ne convenait pas pour déterminer le coût des intrants du sucre brut et n'était pas défendable.

C. Savannah demande au Groupe spécial d'examiner la décision de Revenu Canada au sujet de la date de vente en appliquant la norme de la "décision correcte" ou, subsidiairement, de la "décision raisonnable". Elle soutient que, au regard de l'une ou l'autre de ces normes, la décision que Revenu Canada a rendue au sujet de la date de vente et qui a eu pour effet d'inclure des envois faits en application du contrat ED&F n'était pas défendable.

IV. NORME D'EXAMEN

A. Généralités

La règle de droit régissant la norme d'examen applicable est énoncée à l'article 1911 et au paragraphe 1904(3) de l'ALENA, à l'annexe 1911, à l'article 77.011 de la LMSI et au paragraphe 18.1(4) de la Loi sur la Cour fédérale, L.R.C. (1985), ch. F-7. Le Groupe spécial doit appliquer "les principes juridiques généraux qu'un tribunal de la Partie importatrice appliquerait à l'examen d'une détermination de l'organisme d'enquête compétent" 4. Les principes juridiques généraux du droit interne des parties à l'ALENA comprennent des principes tels que la qualité pour agir, l'application régulière de la loi, les règles d'interprétation des lois, le principe dit mootness et l'épuisement des recours administratifs . 5

L'ALENA et la LMSI renvoient tous deux au paragraphe 18.1(4) de la Loi sur la Cour fédérale, L.R.C. (1985), ch. F-7, qui énonce les motifs pour lesquels une demande de redressement peut être accordée au Canada6 . Plus précisément, le Groupe spécial doit déterminer si Revenu Canada

    a) a agi sans compétence, outrepassé celle-ci ou refusé de l'exercer;

    b) n'a pas observé un principe de justice naturelle ou d'équité procédurale ou toute autre procédure qu'il était légalement tenu de respecter;

    c) a rendu une décision ou une ordonnance entachée d'une erreur de droit, que celle-ci soit manifeste ou non au vu du dossier;

    d) a rendu une décision ou une ordonnance fondée sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments dont il dispose;

    e) a agi ou omis d'agir en raison d'une fraude ou de faux témoignages;

    f) a agi de toute autre façon contraire à la loi.

Pour l'examen des questions de droit, les tribunaux canadiens ont récemment conçu une gamme de normes de contrôle qui va de celle "de la décision manifestement déraisonnable à celle du caractère correct"7 . À une extrémité du spectre, la norme de la décision manifestement déraisonnable s'applique dans des cas restreints, notamment lorsqu'il existe une clause privative qui protège le tribunal ayant rendu une décision qui relève de sa compétence. À l'autre extrémité du spectre se trouve la norme de la décision correcte, qui s'applique aux cas inhabituels où le texte législatif applicable confère un droit d'appel permettant à la cour de justice de substituer son opinion à celle du tribunal et où ledit tribunal n'est pas plus spécialisé que la cour sur la question. Entre ces deux extrêmes, la norme de la décision raisonnable est appliquée lorsque la loi ne comporte aucune clause privative, mais que la décision du tribunal relève de son champ de spécialisation et concerne une question de son ressort . 8

Dans le cas des questions de fait, la retenue observée est habituellement plus grande qu'à l'égard des questions de droit, surtout lorsque le tribunal possède une compétence spécialisée et qu'il est investi d'un pouvoir discrétionnaire. Selon la norme de la décision raisonnable, un groupe spécial ne modifiera les conclusions de fait que lorsque les éléments de preuve, perçus de façon raisonnable, ne peuvent les étayer . 9

Enfin, les principes de justice naturelle et d'équité s'appliquent dans tous les cas et varient selon les circonstances. Ainsi, un groupe spécial peut déterminer si Revenu Canada s'est conformé ou non à l'obligation qui lui incombe d'agir équitablement envers la personne qui soutient être lésée . 10

B. Position des participants

Savannah soutient que, pour se prononcer sur les déterminations de Revenu Canada dont il est question en l'espèce, le Groupe spécial devrait appliquer la norme d'examen de la "décision correcte" ou, subsidiairement, celle de la "décision raisonnable"11 . Selon Savannah, Revenu Canada a commis des erreurs de droit et de fait et a agi d'une façon abusive ou arbitraire, ses déterminations ne sont pas justifiées rationnellement ou logiquement par la preuve, il n'est pas protégé par une clause privative et il ne possédait aucune expertise sur les questions contestées12 . Savannah ajoute que, même si Revenu Canada possède une expertise dans le domaine des lois et des politiques antidumping, cette expertise ne s'étend pas à l'interprétation des concepts dont il est question en l'espèce . 13

Revenu Canada et l'ICS soutiennent tous deux que le Groupe spécial devrait appliquer la norme de la "décision raisonnable" et non celle de la "décision correcte" aux conclusions de fait et de droit de Revenu Canada14 . Selon eux, Revenu Canadan'a commis aucune erreur de fait ou de droit, ses conclusions sont raisonnables en droit, elles s'appuient logiquement sur la preuve et même si Revenu Canada n'est pas protégé par une clause privative, il est suffisamment spécialisé et est investi de la compétence législative nécessaire pour formuler des conclusions appelant une grande retenue . 15

Invoquant le paragraphe 18(1) de la Loi sur la Cour fédérale, Revenu Canada allègue qu'un organisme d'examen doit s'en remettre aux conclusions de droit raisonnables du ministère16 . Revenu Canada cite la décision que le Groupe spécial binational a rendue dans l'affaire Tôles d'acier laminées à froid pour étayer l'argument voulant que les conclusions de fait appellent une plus grande retenue que les conclusions de droit, sauf lorsque les conclusions de fait sont abusives ou arbitraires ou qu'elles ont été tirées sans qu'il soit tenu compte des faits importants17 . Enfin, Revenu Canada souligne que, même si une conclusion de droit ou de fait subsidiaire proposée par une partie plaignante est très raisonnable ou encore plus raisonnable que la conclusion contestée, le Groupe spécial doit confirmer la décision de Revenu Canada lorsque celle-ci est raisonnable . 18

C. Décision du Groupe spécial

Le Groupe spécial conclut que, étant donné que Revenu Canada a, en vertu de la loi, le droit et la responsabilité d'interpréter la LMSI sur une base permanente, les conclusions qu'il tire dans le cadre de l'application de cette loi appellent une très grande retenue. Le Groupe spécial fait donc montre de retenue à l'égard des conclusions de droit que Revenu Canada a tirées au sujet de chaque question soulevée en l'espèce en appliquant la norme de la décision raisonnable, au motif que les conclusions de Revenu Canada sur ces questions relèvent de la responsabilité dont il est expressément investi aux termes de la LMSI. En conséquence, le Groupe spécial rejette l'application de la norme de la décision correcte à l'examen des erreurs de droit et de fait reprochées en l'espèce.

La décision du Groupe spécial d'appliquer la norme du caractère raisonnable aux questions de droit s'appuie sur la conclusion de la Cour suprême du Canada selon laquelle une retenue particulière s'impose à l'égard des conclusions de droit dans les domaines où l'instance décisionnelle possède une compétence spécialisée19 . Dans l'arrêt Pezim c. Colombie-Britannique (Superintendent of Brokers), la Cour suprême du Canada a explicité ce principe en ces termes :

    ... même lorsqu'il n'existe pas de clause privative et que la loi prévoit un droit d'appel, le concept de la spécialisation des fonctions exige des cours de justice qu'elles fassent preuve de retenue envers l'opinion du tribunal spécialisé sur des questions qui relèvent directement de son champ d'expertise . 20

Revenu Canada est un tribunal spécialisé et les questions à trancher en l'espèce ont une importance primordiale pour l'application de la LMSI21 . Une grande retenue s'impose à l'égard des décisions de Revenu Canada, malgré l'absence de clause privative.

L'examen des questions présentées en l'espèce selon le critère du caractère raisonnable est également conforme à la gamme de normes adoptée dans l'arrêt SRC. Même si la retenue observée à l'égard de la décision de Revenu Canada ne vaut pas à l'égard des décisions manifestement déraisonnables, nous sommes d'avis, à l'instar des autres groupes spéciaux binationaux formés en vertu du chapitre 19, qu'une décision de Revenu Canada sur des questions de droit relevant de son champ de compétence peut être examinée en ce qui a trait à la question de savoir si elle constitue une "interprétation raisonnable" . 22

Le Groupe spécial rejette également la demande de Savannah d'évaluer le bien-fondé des conclusions de fait de Revenu Canada23 . Le Groupe spécial ne peut substituer son interprétation des faits à celle de Revenu Canada. Tel qu'il est mentionné ci-dessus, l'alinéa 18.1(4)d) de la Loi sur la Cour fédérale énonce que les décisions ou ordonnances d'un office fédéral qui concernent des questions de fait ne peuvent être annulées que lorsqu'elles sont "fondées ... sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments dont il dispose". Il se peut fort bien qu'un groupe spécial doive s'en remettre à une décision de Revenu Canada alors qu'il en serait peut-être arrivé à une conclusion différente24 . Ainsi, le Groupe spécial fait montre d'une plus grande retenue à l'égard des décisions de Revenu Canada concernant des questions de fait qu'à l'égard de celles qui portent sur des questions de droit.

V. LE CONTEXTE DES OPÉRATIONS DE VENTE DE SAVANNAH

Pour bien cerner les questions en litige en l'espèce, il importe de comprendre le contexte commercial de l'industrie du sucre et la portée des opérations de Savannah. Celle-ci est une société ouverte du Delaware qui raffine du sucre brut et commercialise les marchandises en cause. Michigan Sugar Company ("Michigan Sugar") est une filiale en propriété exclusive de Savannah qui produit les marchandises en cause à partir de betteraves sucrières. Constituée dans l'État du Michigan, Michigan Sugar vend ses produits à l'intérieur des États-Unis à Savannah ainsi qu'à d'autres clients.

Lors de certaines transactions contestées en l'espèce, Savannah a acheté les marchandises en cause FAB des établissements de Michigan Sugar et les a fait expédier de là au Canada. Dans d'autres cas visés par le présent litige, les marchandises en cause exportées au Canada ont été produites à partir de sucre brut provenant des États-Unis et d'ailleurs, lequel sucre avait été mélangé dans les stocks de Savannah.

Les ventes de sucre aux États-Unis sont réglementées par le gouvernement américain. Les quotas prévus dans les tarifs restreignent l'importation des marchandises en cause de l'extérieur25 . En raison des restrictions touchant l'importation, les prix du sucre sont plus élevés aux États-Unis que sur le marché mondial. Le programme concernant le "sucre importé pour réexportation sous forme raffinée" (le "Programme de réexportation") permet aux raffineurs américains agréés d'importer du sucre brut au prix mondial, c'est-à-dire au bas cours n 11, pour produire les marchandises en cause destinées à l'exportation.

Le sucre brut acheté au cours n 11 et importé dans le cadre du Programme de réexportation ne peut être revendu aux États-Unis, sauf aux termes des dispositions du programme qui concernent la substitution, lesquelles permettent aux exportateurs de remplacer une certaine quantité de sucre exporté qui a été produit à partir de sucre brut national (sucre brut acheté au cours n 14) par une quantité équivalente de sucre brut importé au cours n 11. Selon le Programme de réexportation, la substitution de sucre brut importé au cours n 11 au crédit accumulé à l'aide d'exportations de sucre brut acheté au cours n 14 peut se faire au moyen d'ententes de représentation qui permettent que l'exportateur et l'importateur soient deux entités différentes.

Le sucre brut provenant des achats sur le marché mondial et le sucre brut produit aux États-Unis sont des marchandises fongibles. Plutôt que de séparer physiquement les stocks, les producteurs mélangent habituellement le sucre acheté sur le marché mondial avec le sucre brut produit aux États-Unis. Dans leurs systèmes de comptabilité, les producteurs de sucre américains répartissent habituellement les coûts selon que les marchandises sont destinées à la consommation nationale (sucre brut acheté au cours n 14) ou à l'exportation (sucre brut acheté au cours n 11).

VI. DÉTERMINATION DE L'EXPORTATEUR

A. Position des participants

Revenu Canada a décidé que Savannah et Michigan Sugar faisaient partie de la même entité économique et que Michigan Sugar était un "exportateur" aux fins de la détermination de la valeur normale des marchandises aux termes de l'alinéa 15e) de la LMSI. Par conséquent, les coûts de Michigan Sugar ont été inclus dans les calculs du coût de production de Savannah.

Savannah soutient que la LMSI ne renferme aucune définition du mot "exportateur" et qu'elle ne renvoie nullement aux parties liées aux articles 15 à 20 (qui concernent le calcul du coût de production26) . Elle allègue que le législateur a intentionnellement exclu le mot "exportateur" des dispositions pertinentes de la LMSI afin d'éviter que des personnes morales distinctes soient considérées comme une seule entité aux fins du calcul de la valeur normale. Savannah ajoute qu'aux yeux de la common law, les personnes morales comme Savannah et Michigan Sugar sont considérées comme deux entités distinctes27 et qu'aucune interprétation de la LMSI ne devrait conduire à un résultat différent, en l'absence d'une disposition explicite dans cette loi. Enfin, elle fait valoir que la LMSI est une loi fiscale qui devrait être interprétée en faveur de la position du contribuable, en l'occurrence elle-même, savoir que Michigan Sugar ne devrait pas être considérée comme l'exportateur . 28

En réponse, Revenu Canada soutient que l'alinéa 15e) de la LMSI lui permet de traiter des personnes morales distinctes comme une seule et même entité aux fins du calcul de la valeur normale29 . Il affirme que, même si le mot "exportateur" n'est pas défini dans la LMSI, cette loi ne restreint nullement par ailleurs l'enquête visant une entité juridique distincte30 , mais permet la tenue d'enquêtes concernant des "parties associées"31 . Enfin, Revenu Canada estime que l'interprétation du mot "exportateur" de façon à couvrir tant Savannah que Michigan Sugar est appuyée par les éléments de preuve contenus au dossier indiquant que celles-ci avaient formé une coentreprise pour exporter les marchandises en cause au Canada . 32

B. Décision du Groupe spécial

Le fait que la LMSI ne définit pas elle-même le mot "exportateur" n'élimine pas la responsabilité de Revenu Canada de déterminer l'identité de l'exportateur aux fins du calcul de la valeur normale. La désignation des entreprises comme des entreprises visées par une enquête (c.-à-d. la détermination de l'identité de l'exportateur) constitue en effet un élément essentiel de l'application des règles antidumping. En conséquence, le Groupe spécial a examiné la décision de Revenu Canada quant à la question de savoir quelles étaient les entreprises visées par l'enquête en tant qu'exportateurs en se fondant sur la norme de la décision raisonnable plutôt que sur celle de la décision correcte invoquée par Savannah.

Dans le cadre d'une enquête antidumping, il est raisonnable que Revenu Canada examine la nature des liens unissant les parties qui, à son avis, participent au processus d'exportation. Or, les liens unissant Savannah et Michigan Sugar étaient suffisamment importants aux yeux de Revenu Canada pour lui permettre de conclure raisonnablement que les deux entreprises ne constituaient qu'une seule entité économique et que Michigan Sugar pouvait faire l'objet d'une enquête comme exportateur. Savannah et Michigan Sugar ont le même directeur général . 33

Les rapports financiers des deux entreprises, y compris le paiement de l'impôt sur le revenu fédéral, sont établis sous forme d'états consolidés . 35

En plus de ces facteurs d'ordre organisationnel, les caractéristiques particulières des envois en litige démontrent l'existence de liens étroits entre Savannah et Michigan Sugar. Celle-ci produisait les marchandises en cause et les expédiait des États-Unis au Canada directement à partir de ses établissements . 36

Compte tenu de la nature des transactions et des liens unissant les deux entreprises, le Groupe spécial estime que Revenu Canada pouvait raisonnablement conclure, tant en fait qu'en droit, que Savannah et sa filiale Michigan Sugar font partie de la même unité économique pouvant faire l'objet d'une enquête en qualité d'exportateur.

VII. CALCUL DU COÛT DE PRODUCTION

A. Contexte législatif et décision de Revenu Canada

Les alinéas 16b) et 19b) de la LMSI prévoient que, lorsque les ventes de marchandises en cause sur le marché national ne permettent pas le recouvrement des coûts de production et de vente avec le temps, la valeur normale doit être reconstituée. Revenu Canada a demandé des calculs de la valeur reconstituée en l'espèce38 . Savannah ne conteste pas la nécessité des calculs en question, mais s'oppose à ceux que Revenu Canada a faits en ce qui a trait à l'élément coût de production . 39

Le sucre raffiné se compose principalement de sucre brut ou de betteraves sucrières. Aussi, le coût de ces intrants revêt-il "une importance particulière" en l'espèce40 . Pour en arriver à ses conclusions au sujet du coût de production, Revenu Canada a rejeté la méthode que Savannah avait proposée pour l'établissement du coût des intrants du sucre et l'a remplacée par d'autres méthodes.

Revenu Canada a adopté deux méthodes subsidiaires. Dans le cas du sucre produit à partir de betteraves sucrières cultivées aux États-Unis, les composantes du sucre n'avaient pas été mélangées et la source pouvait être déterminée. Revenu Canada s'est fondé sur le coût du traitement de la betterave sucrière fourni par Michigan Sugar pour effectuer les calculs du coût de production à l'égard de ces intrants identifiables.

Dans le cas du sucre raffiné à partir du sucre de canne brut, les composantes étaient fongibles et pouvaient donc être combinées, auquel cas il devenait impossible d'en connaître la provenance. Revenu Canada a tenté de déterminer la moyenne pondérée des coûts du sucre brut importé aux cours n 11 et 14 et consommé lors de la production pendant le mois au cours duquel le sucre a été exporté au Canada, en tenant compte de l'évolution des quantités de ces articles stockés.

B. Position des participants

Savannah allègue d'abord que la détermination de la méthode applicable au calcul du coût de production conformément à la LMSI n'est pas une question qui relève de l'expertise de Revenu Canada et qu'un examen de la justesse de cette décision s'impose. Subsidiairement, Savannah demande que la décision de Revenu Canada soit révisée quant à son caractère raisonnable en fait et en droit.

Savannah soutient qu'elle comptabilise le coût de production selon que le sucre est vendu au pays ou exporté et qu'elle ne tient pas de stocks distincts de sucre brut classé selon sa provenance. Elle ajoute que sa méthode de comptabilisation des coûts est conforme aux principes comptables généralement reconnus ("PCGR"), fait certifié par d'éminents comptables-experts. Elle invoque le Code antidumping du GATT pour soutenir que Revenu Canada aurait dû adopter sa méthode de répartition du coût pour toutes les ventes, que les stocks de sucre brut de différentes provenances aient été mélangés ou non, parce qu'il s'agissait de la façon normale de procéder de Savannah et d'une méthode approuvée selon les PCGR.

Savannah ajoute que, lorsqu'il y a combinaison des entrants, il est impossible de déterminer la proportion physique de sucre brut acheté au cours n 11 et au cours n 14 et utilisé dans la production de marchandises en cause spécifiques exportées au Canada41 . Elle conteste la méthode d'établissement des coûts selon la moyenne pondérée que Revenu Canada a utilisée pour déterminer le coût de production aux fins d'établir la valeur normale. Plus précisément, elle allègue que la méthode utilisée par Revenu Canada pour déterminer le coût de production lié aux intrants combinés était irrationnelle parce qu'elle reposait sur les valeurs des stocks de Savannah Foods, lesquelles étaient fondées sur la méthode comptable de Savannah précédemment rejetée par Revenu Canada.

Revenu Canada répond que la détermination de la méthode appropriée est une question qui relève de son champ d'expertise, puisqu'elle se pose dans le cadre de l'interprétation et de l'application de la LMSI42 . Selon Revenu Canada, la LMSI ne l'oblige pas à adopter une méthode particulière pour la seule raison qu'elle est conforme aux PCGR. Le ministère soutient qu'il a le pouvoir discrétionnaire d'adopter une autre méthode aux fins de déterminer les coûts lorsque cette autre méthode est raisonnable et compatible avec la LMSI.

Revenu Canada fait également valoir que, selon la LMSI, la reconstitution de la valeur normale des marchandises exportées au Canada doit être fondée sur les coûts réels de production et de vente des marchandises43 . D'après l'analyse qu'il a faite de la méthode comptable utilisée par Savannah, les coûts attribués aux ventes découlaient de la combinaison des stocks de sucre brut acheté aux cours n 11 et 14 et Savannah a attribué ces coûts sans chercher à savoir si le sucre raffiné avait été produit à partir de sucre de canne brut ou à partir de betterave sucrière. C'est l'une des raisons pour lesquelles Revenu Canada estime que la méthode employée par Savannah pour attribuer les coûts aux ventes n'était pas liée à la production des marchandises vendues.

C. Décision du Groupe spécial

1. Examen selon la norme du caractère raisonnable

L'examen du Groupe spécial en l'espèce vise à évaluer le "caractère raisonnable" de la décision de l'organisme. Nous n'adoptons pas la norme de la "justesse" que Savannah nous demande d'appliquer. Le rôle de Revenu Canada consiste à appliquer les règles antidumping44 . Le coût de production représente un élément clé de l'alinéa 19b) de la LMSI, lequel constitue un aspect essentiel des règles en question. La détermination des éléments faisant partie du coût de production revêt donc une importance primordiale aux fins de l'application des règles antidumping. Les conclusions de Revenu Canada peuvent s'appuyer sur des analogies juridiques, mais ses connaissances spécialisées devraient prévaloir en ce qui concerne la définition des concepts primordiaux dans ce domaine, sauf si cette interprétation est déraisonnable.

2. Rejet de la méthode de Savannah par Revenu Canada

L'expression "coût de production" n'est pas définie dans la LMSI, mais l'alinéa 11a) du Règlement sur les mesures spéciales d'importation la définit comme l'ensemble des coûts "attribuables ou liés à la production des marchandises"45 . Le mot "attribuables" n'est pas défini dans le Règlement.

Pour déterminer le coût de production et répondre à la question de savoir si les coûts sont "attribuables ou liés" au coût de production, Revenu Canada peut se fonder sur le Code antidumping afin d'interpréter les règles antidumping canadiennes. Selon le Code, les coûts devraient "normalement" être calculés d'après les registres de l'exportateur, lorsque ceux-ci sont tenus conformément aux PCGR et qu'ils "tiennent compte raisonnablement des frais associés à la production et à la vente du produit considéré"46 . En fait, Revenu Canada accepte habituellement la méthode d'une entreprise qui est fondée sur les PCGR . 47

Néanmoins, Revenu Canada a rejeté la méthode de Savannah qui était fondée sur les PCGR pour le calcul du coût de production. Dans l'énoncé des motifs justifiant sa décision, Revenu Canada a dit ce qui suit : "Le ministère est d'avis que la répartition des coûts proposés par les exportateurs ne reflète pas le coût réel des marchandises et que le coût du sucre raffiné devrait tenir compte du coût réel des intrants"48 . De la même façon, Revenu Canada a dit que, [TRADUCTION] "pour déterminer le coût des marchandises au titre de la LMSI, nous devons tenir compte du coût réel des intrants bruts utilisés pour produire les marchandises en cause" . 49

L'emploi par Revenu Canada du mot "réel" pour rejeter la méthode de Savannah n'est pas lié à la formule du Règlement actuel en ce qui concerne l'établissement des coûts. De plus, l'utilisation par Revenu Canada du mot "réel" était illogique dans le contexte de la présente affaire50 . Nonobstant cette confusion quant à l'utilisation du mot "réel", le Groupe spécial en arrive à la conclusion que Revenu Canada a fait plus que des efforts futiles pour calculer les coûts "réels".

Revenu Canada a estimé que l'attribution par Savannah des coûts du sucre acheté au cours n 11 à toutes les exportations ne donnait pas une bonne indication de [ ]51 . Plus précisément, Revenu Canada a conclu en ces termes :

    [TRADUCTION] Les exportateurs américains réalisent une perte lors de plusieurs exportations en vendant du sucre produit à partir de betteraves sucrières ou de sucre brut acheté au cours n 14, dont le prix est élevé, à des o prix peu élevés dictés par la concurrence sur le marché mondial libre. Les pertes qu'ils engagent ainsi [ ] . 52

Selon Revenu Canada, [TRADUCTION] "le fait que la méthode utilisée par les exportateurs pour l'établissement des coûts soit acceptable selon les PCGR pour les déclarations présentées à l'administration fiscale et à la Commission des valeurs mobilières ne signifie pas que ces données donnent une indication raisonnable des coûts liés à des ventes particulières, ce qu'exige la LMSI" . 53

Revenu Canada a également rejeté les attributions de coûts de Savannah, parce qu'elles ne traduisaient pas les observations qu'il a faites quant à la production et à la livraison des marchandises au Canada. Selon Revenu Canada, c'est l'identification spécifique qui permettait le mieux d'évaluer le coût des marchandises produites. Revenu Canada a donc tenté de lier des intrants spécifiques à chaque transaction d'exportation54 . C'est pour cette raison qu'il a refusé d'attribuer les coûts du sucre importé au cours n 11 au sucre qu'il pouvait identifier de façon précise comme du sucre produit et exporté directement par Michigan Sugar55 . Tel qu'il est mentionné ci-après, Revenu Canada a utilisé les registres de Michigan Sugar qui concernaient ces envois identifiés pour une partie de son calcul du coût de production.

Dans le cas des marchandises combinées, Revenu Canada a reconnu qu'il était impossible de "savoir exactement quelles sont les matières premières utilisées"56 . Néanmoins, il a rejeté à nouveau la méthode de Savannah, estimant que les coûts attribués à partir d'une combinaison de stocks d'intrants ne pouvaient servir à déterminer le coût de production des marchandises, parce qu'ils ne tenaient pas compte de l'écart des prix des matières entrant dans la composition du sucre brut de toute provenance au cours de la période sous enquête . 57

Effectivement, Savannah admet [TRADUCTION] "qu'il n'y a aucun lien direct entre le stock comptable de sucre brut acheté au cours n 11 et au cours n 14 à un moment donné et le sucre brut effectivement utilisé pour la production de marchandises en cause spécifiques, parce que les stocks de sucre importé aux cours n 11 et 14 sont fongibles et combinés"58 .

Tel qu'il est mentionné ci-après, pour déterminer le coût du sucre brut "combiné" utilisé au cours de la production des marchandises en cause aux fins de l'exportation, Revenu Canada a utilisé la moyenne pondérée du coût du sucre brut acheté aux cours n 11 et 14 qui a été utilisé lors de la production pendant le mois d'expédition concerné59 . Revenu Canada a reconnu dans son mémoire que, [TRADUCTION] "même si ce coût ne correspondait pas au coût de production réel des marchandises, il permettait d'obtenir un coût raisonnable lié à cette production aux fins de la LMSI" . 60

Bref, Revenu Canada n'a pas rejeté la méthode de Savannah simplement en invoquant le mot "réel". Il a plutôt comparé les répartitions de coûts de Savannah avec les activités de celle-ci pour déterminer si ces répartitions donnaient une indication raisonnable des coûts se rapportant à des ventes particulières au cours de la période sous enquête. Il a conclu qu'il existait une autre méthode permettant de donner une meilleure indication du coût des intrants.

Tel qu'il est mentionné dans la partie du présent avis qui concerne la norme d'examen, il est reconnu en droit administratif canadien qu'une décision d'un tribunal peut être raisonnable même lorsqu'une autre possibilité raisonnable a été rejetée. De fait, la décision du tribunal peut être raisonnable même si la solution rejetée l'est peut-être plus que celle du tribunal dans les circonstances présentées . 61

En ce qui a trait aux méthodes fondées sur les PCGR, "Revenu Canada n'est pas tenu, en vertu de la LMSI, d'adopter une méthode d'attribution donnée pour la seule raison qu'elle est conforme aux PCGR" . Bien que les PCGR62 "énoncent, pour l'attribution, des règles bien établies", Revenu Canada "n'est pas lié" par ces méthodes"63 . Ainsi, "la LMSI laisse à Revenu Canada le soin d'adopter une autre méthode lorsque ... l'autre méthode est raisonnable dans les circonstances et qu'elle est compatible avec la LMSI"64 . Nous nous demandons ci-après si l'autre méthode adoptée par Revenu Canada pour déterminer les coûts était raisonnable.

3. Caractère raisonnable de la détermination du coût de production faite par Revenu Canada quant aux intrants tirés des betteraves sucrières

Le Groupe spécial a soutenu la décision de Revenu Canada de tenir une enquête au sujet de Michigan Sugar comme exportateur. Par conséquent, le sucre raffiné exporté du Canada depuis les usines de traitement de betterave exploitées par Michigan Sugar pouvait bel et bien faire l'objet de l'enquête.

Comme nous l'avons signalé précédemment, Revenu Canada a estimé que la façon la plus précise d'évaluer le coût des marchandises produites était [TRADUCTION] "de procéder par identification spécifique, ... c'est-à-dire en reliant spécifiquement les matières constituant des intrants à chaque exportation"65 . Les registres de Savannah ont permis à Revenu Canada d'identifier précisément les exportations au Canada de sucre produit à l'établissement de Michigan Sugar et exporté directement au Canada, c'est-à-dire les cas dans lesquels les marchandises en cause n'ont pas été produites à partir d'intrants de sucre brut qui avaient été combinés66 . Aucune partie n'a nié que les matières premières utilisées aux usines de traitement des betteraves pour produire le sucre raffiné étaient des betteraves sucrières brutes67 . Revenu Canada a utilisé le coût proposé par Michigan Sugar à l'égard des betteraves sucrières et de leur traitement pour déterminer le coût du sucre raffiné produit à partir de betteraves sucrières à ses établissements.

Le Groupe spécial est d'avis que les efforts de Revenu Canada pour relier les intrants aux exportations découlent d'une interprétation raisonnable de la LMSI, qu'étayent l'alinéa 19b) de cette loi et l'alinéa 11a) du Règlement. De plus, l'interprétation de Revenu Canada est compatible avec l'alinéa 15e), qui prévoit que la comparaison des valeurs doit avoir lieu à l'endroit de l'expédition68 . La politique établie de Revenu Canada consiste à tenir compte des [TRADUCTION] "différences sur le plan des coûts et de l'efficacité, des économies d'échelle, de la technologie, de l'équipement et des méthodes de production entre les usines, éléments qui peuvent tous avoir une incidence sur le coût et la rentabilité des marchandises produites et vendues par les différents établissements"69 . En conséquence, la décision de Revenu Canada d'attribuer les coûts en reliant les envois spécifiques des marchandises en cause à la production faite à partir d'intrants identifiables (stocks de sucre raffiné non combinés) était raisonnable, en fait et en droit.

4. Renvoi de la décision de Revenu Canada au sujet du coût de production des intrants de stocks combinés

La question la plus difficile à trancher concerne l'établissement du coût des intrants dont le lieu de production ne peut être déterminé. Comme nous l'avons dit précédemment dans le présent avis, la méthode de Savannah consistait à combiner les intrants de sucre brut produits aux États-Unis avec les intrants de sucre achetés sur le marché mondial. Les marchandises en cause, produites à partir des stocks de sucre combinés, ont été exportées au Canada. Savannah ayant soutenu que la méthode de Revenu Canada était fondée sur les hypothèses mêmes que ce dernier avait rejetées, le Groupe spécial a tenté de reconstituer le mécanisme de calcul des coûts attribués à la production à partir des intrants combinés. En examinant la base de données qui constituait le fondement des conclusions, le Groupe spécial s'est efforcé d'apprécier pleinement le caractère raisonnable de la décision de Revenu Canada.

Comme nous l'avons souligné précédemment, le programme "pour le sucre importé pour réexportation sous forme raffinée" ("Programme de réexportation") permet aux raffineurs américains agréés d'importer du sucre brut au bas prix mondial en vigueur pour la production de sucre raffiné ou de produits contenant du sucre destinés à l'exportation. Les dispositions du Programme de réexportation relatives à la substitution autorisent "l'exportation du sucre raffiné avant que la quantité correspondante de sucre brut au cours n 11 ait été importée"70 . Le Programme de réexportation permet donc d'accumuler des crédits à l'exportation grâce auxquels les producteurs de sucre, dont Savannah, peuvent importer plus tard des quantités équivalentes de sucre brut au cours n 11 . 71

Le Programme de réexportation exige la tenue de registres servant à comptabiliser la quantité d'importations et d'exportations72 . En vertu de ce programme, "le raffineur doit tenir des registres et s'assurer qu'une quantité de sucre raffiné, ou de produits contenant du sucre, correspondant à la quantité de sucre brut importé au cours n 11, est exportée dans un délai déterminé"73 . Revenu Canada pouvait identifier et quantifier avec précision le total des opérations mensuelles d'exportation et d'achat de sucre au cours n 11 à partir des registres utilisés par Savannah aux fins d'un rapprochement et d'une répartition des coûts.

Revenu Canada a constaté que le processus de production utilisé pour raffiner le sucre de canne brut se caractérise par une rotation des stocks rapide et un court délai de production74 . Lorsqu'il a calculé le coût des ventes pour exportation, il a donc tenté de déterminer la moyenne pondérée des coûts du sucre brut importé aux cours n 11 et 14 et consommé dans le processus de production pendant le mois d'expédition concerné . 75

Dans le cas du sucre combiné, Revenu Canada a calculé la moyenne pondérée des coûts de production d'un mois donné en utilisant les soldes d'ouverture des stocks de sucre brut acheté aux cours n 11 et 14, en y ajoutant les recettes de sucre brut au cours de ce mois et en retranchant du résultat les stocks de clôture. Il ne semble pas que la mécanique de la méthode de Revenu Canada soit contestée. En effectuant les calculs en question, Revenu Canada [TRADUCTION] "faisait simplement les opérations arithmétiques" . 76

Les calculs de Revenu Canada étaient fondés sur la documentation (VE11 (révisée)) fournie par Savannah et reflétant la façon dont celle-ci a appliqué le Programme de réexportation. La colonne des données décrivant le volume cumulatif des ventes à l'exportation et les achats de sucre au cours n 11 [ ]. Il appert des données que [ ] . 77

Lorsque le solde relatif au sucre brut acheté au cours n 11 était négatif, Revenu Canada présumait un solde d'inventaire inexistant pour ce sucre. Cette interprétation de la pièce VE11 n'est pas contestée. L'avocat de Savannah a résumé la situation en ces termes : [TRADUCTION] "le fait que la position du stock soit négative n'a aucune importance. Ça n'a vraiment aucune importance. Pourquoi, parce que nous avons déjà fait l'exportation en question... Le solde est égal à zéro ou est négatif seulement parce que nous avons fait la vente et que les marchandises ne sont pas encore arrivées" . 78

Cependant, Savannah a apparemment toujours combiné les intrants de sucre brut et ne peut séparer physiquement les marchandises. Même si les données indiquent peut-être fidèlement le mouvement cumulatif des stocks de sucre brut au cours de la période pendant laquelle ces registres ont été tenus, la détermination des niveaux du stock de sucre acheté au cours n 11 dépend de la composition du stock à la date à laquelle les mouvements ont d'abord été mesurés. Ainsi, les données sur les mouvements indiquent apparemment l'évolution cumulative des achats et des ventes à l'exportation, mais intègrent dans une certaine mesure les éléments dont le stock d'ouverture se composait à la date à laquelle le système de tenue de registres actuellement utilisé a été mis sur pied. Aucun élément de la preuve présentée au Groupe spécial n'indique que Revenu Canada a examiné cette lacune dans les données soumises. Bien au contraire, Revenu Canada a constamment exigé que les volumes des articles stockés soient déclarés et a considéré la pièce VE11 révisée comme établissant les niveaux exacts des articles stockés79 . Le Groupe spécial estime donc que Revenu Canada n'a pas examiné la question de la composition du stock d'ouverture et renvoie cette question pour nouvel examen.

Le raisonnement de Revenu Canada doit être transparent. La décision qu'il a rendue et les mémoires déposés en l'espèce ne renferment pas d'explication précise sur les calculs effectués ou sur les présomptions formulées à l'égard des intrants de sucre combinés. Le Groupe spécial a examiné la méthode de Revenu Canada en posant des questions au cours des plaidoiries et en étudiant le dossier lui-même, mais il ne devrait pas être tenu de reconstituer le processus décisionnel. Compte tenu du degré élevé de retenue observée à l'égard des décisions de Revenu Canada, celui-ci devrait indiquer clairement dans sa décision le cheminement qu'il a suivi et les calculs qu'il a faits.

En ce qui a trait à l'utilisation de la pièce VE11 (révisée) par Revenu Canada et à la transparence du processus décisionnel, le Groupe spécial souligne également qu'il ne sait pas très bien si le sucre attribuable aux envois de Michigan Sugar a été séparé des stocks de sucre acheté au cours n 14 déclarés dans la pièce VE11 (révisée) et si la séparation toucherait les calculs des stocks.

Enfin, le Groupe spécial souligne que la période de référence utilisée pour l'évaluation des données, c'est-à-dire une période mensuelle, a eu une influence considérable sur les calculs de la marge. Si les données avaient été examinées sur une base annuelle, des résultats bien différents pourraient être obtenus au sujet du subventionnement. Néanmoins, Revenu Canada a justifié cette décision méthodologique d'une façon sommaire80 . Ainsi, dans les explications qu'il a données, Revenu Canada n'a fait aucune allusion à ses pratiques administratives antérieures dans les cas de marchandises dont les cycles de production et les délais de rotation des stocks s'apparentaient à ceux de la présente affaire. La sélection d'une base mensuelle pour le calcul des coûts de production était une décision d'ordre méthodologique importante qui devait être expliquée de façon détaillée.

Dans les instructions de renvoi qu'il formule à la fin du présent avis, le Groupe spécial demande à Revenu Canada de réévaluer sa méthode d'établissement des coûts des intrants combinés en tenant compte du problème de l'établissement des stocks de base du sucre brut acheté aux cours n 11 et 14. Le Groupe spécial enjoint également à Revenu Canada de justifier la méthode qu'il a utilisée dans les autres domaines examinés dans le présent avis. Rien dans l'avis ou les instructions de renvoi du Groupe spécial ne doit être interprété comme une opinion quant à la méthode qu'il privilégie pour l'établissement du coût de production des intrants combinés.

VIII. CARACTÈRE RAISONNABLE DE LA DÉTERMINATION DE REVENU CANADA QUANT À LA DATE DE VENTE

A. Le contexte factuel et la décision de Revenu Canada

Pour déterminer quelles sont les transactions visées par l'enquête, Revenu Canada doit décider si la "date de vente" se trouve à l'intérieur de la période sous enquête. Le 8 décembre 1992, Savannah et ED&F Man ont conclu une entente relative à l'achat des marchandises en cause ("contrat ED&F"). La période de l'enquête allait du 1er janvier 1994 au 28 février 1995. Certains envois faits en application du contrat ED&F ont eu lieu avant la période de l'enquête, tandis que d'autres ont été effectués au cours de cette période.

Revenu Canada a conclu que les conditions essentielles de la transaction n'avaient pas été établies par le contrat ED&F et que la date de la conclusion de ce contrat ne coïncidait donc pas avec la date de vente. Il a décidé que les factures de vente étaient le premier document établissant de façon précise les conditions essentielles de la vente et il s'est servi de la date des factures comme date de vente. Lorsque la facture de vente n'était pas disponible, il a présumé que la date de vente correspondait à la date d'expédition.

B. Position des participants

Savannah soutient que, pour déterminer ce qui constitue une vente ou un contrat de vente, il faut se reporter aux règles régissant les contrats, la vente de marchandises et les transactions commerciales. Selon elle, ces questions ne relèvent pas de l'expertise de Revenu Canada et la décision de ce dernier au sujet de la date de vente devrait être révisée sous l'angle de la justesse plutôt que sous l'angle du caractère raisonnable . 81

Savannah décrit le contrat ED&F comme un "engagement de vendre" qui constitue une "vente" au sens de la LMSI. Selon elle, étant donné que "l'engagement de vendre" était visé par la définition du mot "vente" de la LMSI, il n'était pas nécessaire que Revenu Canada aille plus loin pour savoir si les conditions essentielles de la vente avaient été déterminées . 82

Savannah souligne que Revenu Canada avait, en vertu de la loi, le pouvoir d'élargir la période de l'enquête au titre de l'alinéa 15d) de la LMSI, mais qu'il ne l'a pas fait. Par conséquent, étant donné que l'engagement de vendre a été conclu en dehors de la période de l'enquête, Savannah estime que les transactions faites en application de ce contrat n'auraient pas dû être incluses dans le calcul du prix à l'exportation. Elle ajoute que, en tout état de cause, le contrat ED&F était suffisamment défini à la date de signature pour permettre à Revenu Canada de conclure que les conditions essentielles de la transaction avaient été établies à cette date.

Revenu Canada répond en disant que l'absence de définition de l'expression "date de vente" dans la LMSI indique manifestement que le législateur entendait que le ministère utilise son expertise pour déterminer cette date83 . Revenu Canada décrit le contrat ED&F comme un "accord général" qui n'énonçait pas toutes les conditions de la vente. La date de vente a plutôt été déterminée, à bon droit, en fonction de la date de la facture de vente établie par Savannah Foods avant l'expédition des marchandises ou en fonction de la date de l'envoi, si la date de la facture ne pouvait être obtenue84 . Selon Revenu Canada, c'est à ces dates que les conditions essentielles du contrat ED&F ont pu être déterminées pour la première fois.

C. Décision du Groupe spécial

La détermination de la date de vente représente un aspect crucial d'une enquête antidumping, parce que cette date permet de définir les ventes qui seront utilisées pour comparer la valeur normale avec le prix à l'exportation aux fins de décider s'il y a eu sous-évaluation des marchandises en cause. Revenu Canada ayant la charge de sélectionner la méthode applicable au calcul du prix à l'exportation, il doit avoir le pouvoir nécessaire pour déterminer la date de vente elle-même. Cette fonction est raisonnablement connexe ou accessoire au calcul du prix à l'exportation. Revenu Canada a raison de dire que [TRADUCTION] "la sélection d'une date de vente dans les enquêtes antidumping se rattache spécifiquement aux objets de la LMSI qui, sur ce point, est diffère de toute autre loi régissant les transactions commerciales"85 . L'interprétation de la LMSI par Revenu Canada pour déterminer la date de vente relève des attributions que la loi lui confère et devrait être examinée en fonction de son caractère raisonnable.

Aux termes de la LMSI, "[s]ont assimilés à la vente la location, l'engagement de vendre ou de louer et les offres réelles"86 . Aux fins de l'analyse du Groupe spécial, nous reconnaissons que le contrat ED&F était un engagement de vendre et une "vente" au sens de la LMSI87 . Néanmoins, le fait qu'un engagement de vendre constitue ou non une vente aux termes de la LMSI ne permet pas de conclure que la date de vente coïncide avec la date de l'engagement.

Même si la LMSI elle-même est muette quant à la méthode à appliquer pour déterminer la "date de vente", Revenu Canada invoque à bon droit l'Accord sur la mise en oeuvre de l'article VI de l'Accord général sur les tarifs douaniers et le commerce, qui prévoit que la date de vente appropriée peut être déterminée à partir de la date du contrat, du bon de commande, de la confirmation du bon de commande ou de la facture, selon celui des documents en question qui établit les conditions essentielles de vente88 . De plus, la détermination de la date à laquelle les conditions essentielles d'une transaction ont été fixées pour connaître la "date de vente" est apparemment conforme à la pratique établie du tribunal . 89

Compte tenu des données du dossier, il est permis de dire que la conclusion de Revenu Canada selon laquelle les conditions essentielles de vente n'étaient pas énoncées dans le contrat ED&F du 8 décembre 1992 est raisonnable. En effet, bon nombre des conditions essentielles du contrat étaient encore susceptibles d'être modifiées tant par l'acheteur que par le vendeur jusqu'à la date à laquelle la facture de vente a été établie par Savannah ou à laquelle les marchandises ont effectivement été expédiées à l'acheteur.

Même si le contrat du 8 décembre 1992 renfermait une formule permettant de calculer le prix à une date ultérieure fixée, la détermination du prix exact pouvait dépendre jusqu'à un certain point des choix faits par les parties. De plus, la quantité n'était pas fixée, mais était fondée sur une [TRADUCTION] "quantité minimale et maximale, la quantité finale devant être déterminée par avis donné par l'acheteur dans les 90 jours suivant la signature du contrat"90 . La catégorie ou la qualité de la marchandise était également fonction de sa disponibilité à la date fixée pour la livraison du produit91 . En conséquence, Revenu Canada pouvait raisonnablement conclure que la date de la vente pour chacune des transactions en question n'était pas la date du contrat ED&F, mais une date subséquente visée par la période de l'enquête.

De l'avis du Groupe spécial, le dossier administratif renfermait suffisamment d'éléments de preuve objectifs qui permettaient à Revenu Canada de conclure que la date de vente pour les envois effectués en application du contrat ED&F se trouvait à l'intérieur de la période de l'enquête et que les envois en question devaient donc être inclus dans le calcul du prix à l'exportation effectué par Revenu Canada.

IX. CONCLUSION

Pour les motifs exposés ci-dessus, la décision de Revenu Canada est confirmée en partie et renvoyée en partie.

INSTRUCTIONS DE RENVOI :

1. Revenu Canada doit expliquer en quoi la méthode qu'il a appliquée pour déterminer le coût des intrants de sucre brut est raisonnable dans le cas des stocks combinés. Si Revenu Canada en arrive à la conclusion qu'il peut déterminer la composition physique du stock de base ou stock d'ouverture, il devrait décrire de façon détaillée l'analyse qui lui permet de tirer cette conclusion. S'il ne peut déterminer la composition physique du stock de base ou du stock d'ouverture, il doit expliquer pourquoi sa méthode est raisonnable malgré l'adoption des données fournies par Savannah quant au stock d'ouverture.

2. Si Revenu Canada conclut que l'impossibilité d'établir les niveaux de stock de base compromet de façon irrémédiable sa méthode, il pourra déterminer le coût de production des marchandises combinées à l'aide de toute autre méthode qu'il estime raisonnable.

3. Revenu Canada devrait déterminer s'il convient de séparer une partie du stock de sucre brut acheté au cours n 14 et attribuable à Michigan Sugar pour calculer le coût des intrants o combinés. S'il convient d'effectuer une séparation et que cette opération n'a pas été faite dans les calculs antérieurs, Revenu Canada devrait procéder à cette analyse et indiquer si le changement a des répercussions importantes sur les calculs de coûts qu'il a faits.

4. Revenu Canada devrait justifier de façon précise la décision d'analyser les données relatives à l'utilisation du stock aux fins du calcul des coûts sur une base mensuelle. Il devrait également préciser si la période choisie a eu une influence importante sur le volume de dumping qu'il a constaté.

Revenu Canada communiquera les résultats du présent renvoi au Groupe spécial dans les 45 jours suivant la présente décision.

ORDONNANCE

Pour les motifs exposés dans l'avis, le Groupe spécial confirme en partie la décision définitive de Revenu Canada. Il renvoie également en partie la décision définitive de Revenu Canada pour un nouvel examen compatible avec l'avis et les instructions de renvoi. Revenu Canada communiquera les résultats du renvoi au Groupe spécial dans les 45 jours suivant la présente décision.

ORIGINAL SIGNÉ PAR :

    Brian E. McGill, président

    Jane C. Luxton

    Leonard E. Santos

    Leon E. Trakman

    Wilhelmina K. Tyler

Le 9 octobre 1996

1 British Columbia Sugar Refining Company, Limited, Lantic Sugar Limited et Redpath Sugars, division des Industries Redpath Limitée.

2Les marchandises en cause s'entendent du sucre raffiné tiré de la canne à sucre ou de la betterave sucrière sous forme de granules, de liquide et de poudre, y compris (1) le sucre blanc raffiné; (2) le sucre liquide, y compris le sucre inverti, et (3) les sucres spéciaux (y compris le sucre roux et la cassonade dorée, le sucre à glacer, le sucre à la démérara et d'autres sucres). Un large éventail de méthodes sont utilisées pour l'expédition et le conditionnement des marchandises en cause.

3 Décisions définitives concernant le sucre raffiné de certains pays, 5 octobre 1995.

4 Paragraphe 1904(3) de l'ALENA.

5 Article 1911 de l'ALENA.

6 Annexe 1911a) de l'ALENA; paragraphe 77.011(5) de la LMSI.

7 Société Radio-Canada c. Conseil canadien des relations du travail, [1995] 1 R.C.S. 157, (ci-après SRC).

8 Id.; voir également l'arrêt Pezim c. Colombie-Britannique (Superintendent of Brokers), [1994] 2 R.C.S. 557, (ci-après Pezim).

9 Lester c. AUCAIPT, section locale 790, [1990] 3 R.C.S. 644, p. 669; En l'affaire de certains produits en tôle d'acier résistant à la corrosion originaires ou exportés des États-Unis d'Amérique (Préjudice) CDA-94-1904-04, p. 8.

10 Martineau c. Comité de discipline de l'Institution de Matsqui, [1980] 1 R.C.S. 602.

11 Mémoire de réponse de Savannah Foods & Industries, Inc. (ci-après mémoire de réponse de Savannah), p. 14.

12 Id., p. 14; transcription de l'audience publique, 10 juillet 1996 (ci-après transc. audience publique), p. 4 à 6.

13 Transc. audience publique, p. 9 (Pearson).

14 Id., p. 148, 150 (Thomas).

15 Id., p. 162 (Thomas).

16 Mémoire de l'autorité chargée de l'enquête, le sous-ministre du Revenu national (ci- après mémoire de Revenu Canada), p. 38 à 40.

17 Certaines tôles d'acier laminées à froid et originaires ou exportées des États-Unis d'Amérique (Dumping) (1993), CDA-93-1904-08 (Groupe spécial binational); En l'affaire de Tapis produits sur machines à touffeter, originaires ou exportés des États-Unis d'Amérique, CDA-92-1904-01 (ci-après Groupe spécial des tapis produits sur machines à touffeter); transc. audience publique, p. 250 (Woyiwada).

18 Transc. audience publique, p. 251 (Woyiwada).

19 Voir, par exemple, Canada (Procureur général) c. Mossop, [1993] 1 R.C.S. 554, p. 670 (ci-après Mossop); Fraternité unie des charpentiers et menuisiers d'Amérique, section locale 579 c. Bradco Construction Ltd., [1993] 2 R.C.S. 316, p. 415 (ci-après Bradco). Voir également le jugement dissident de Madame le juge L'Heureux-Dubé dans Zurich Insurance Co. c. Ontario (Commission des droits de la personne) (1992), 93 D.L.R. (4th Cir.) 346, p. 373, cité avec approbation dans l'arrêt Mossop à la page 670.

20 Pezim, p. 591.

21 Revenu Canada possède une compétence spécialisée au sujet des questions de droit qui s'appliquent aux décisions antidumping. Voir En l'affaire de la décision définitive de dumping rendue par le sous-ministre du Revenu national, Douanes et Accise, relativement au placoplâtre originaire ou exporté des États-Unis d'Amérique, dossier du Secrétariat n o CDA-93-1904-01 (ci-après Groupe spécial du placoplâtre) à la page 17 et à la page 48, note 41, où l'arrêt University of British Columbia c. Berg (1993), 102 D.L.R. (4th) 665, p. 676 et 77 est cité.

22 Voir En l'affaire de la bière originaire ou exportée des États-Unis d'Amérique et provenant de G. Heilman Brewing Company, Inc. Pabst Brewing Company et the Stroh Brewery Company, ou exportée de ces sociétés, pour utilisation ou consommation dans la province de la Colombie-Britannique, dossier du Secrétariat n CDA-91-1904-01, p. 10 (ci- o après Groupe spécial de la bière); Groupe spécial des tapis produits sur machines à touffeter, p. 6; voir également Groupe spécial du placoplâtre, où le groupe spécial a déconseillé le renvoi automatique à Revenu Canada des décisions concernant les questions de droit, mais a appliqué une norme d'examen fondée sur le caractère raisonnable pour évaluer la façon dont Revenu Canada avait traité certains frais d'intérêt.

23 Mémoire de Savannah, p. 33.

24 Certaines tôles d'acier laminées à froid originaires ou exportées des États-Unis d'Amérique, CDA-93-1904-08 (Groupe spécial binational) (1993).

25 Mémoire non confidentiel de l'Institut canadien du sucre (ci-après mémoire du ICS), p. 2.

26 Mémoire de Savannah, p. 47 et 48.

27 Au soutien de cette allégation, Savannah invoque les arrêts Goodyear Tire & Rubber Co. Of Canada v. T. Eaton Co. (1956), 4 D.L.R. (2d) 1, p. 6, et R. c. T.(V.), [1992] 1 R.C.S. 749.

28 Mémoire de Savannah, p. 48.

29 Mémoire de Revenu Canada, p. 56.

30 Id., p. 55.

31 Id., p. 56. De la même façon, l'Institut canadien du sucre allègue que l'absence d'une définition législative de l'exportateur indique que le législateur a laissé à Revenu Canada le soin de déterminer l'identité de l'exportateur dans les circonstances de chaque espèce. Mémoire de l'ICS, p. 44.

32 Mémoire de Revenu Canada, p. 60.

33 Mémoire de Revenu Canada, p. 58.

34 Mémoire confidentiel de Revenu Canada, p. 58.

35 Mémoire de Revenu Canada, p. 58.

36 Id., p. 61.

37 Mémoire confidentiel de Revenu Canada, p. 59.

38 Énoncé des motifs, n 4237-80 et 4218-2, 5 octobre 1995 (ci-après Énoncé des motifs), os aux pages 4 et 9; voir également le mémoire de Revenu Canada, p. 12.

39 La valeur reconstituée correspond à "la somme des montants suivants : (i) le coût de production des marchandises; (ii) un montant raisonnable pour les frais, notamment les frais administratifs et les frais de vente, (iii) un montant raisonnable pour les bénéfices". Alinéa 19b) de la LMSI.

40 Énoncé des motifs, p. 5.

41 Mémoire de Savannah, p. 5.

42 Mémoire de Revenu Canada, p. 47.

43 Mémoire de Revenu Canada, p. 48.

44 Voir Groupe spécial de la bière, p. 17 ("L'interprétation et l'application de la LMSI relèvent tout à fait du champ de spécialisation de Revenu Canada").

45 Gazette du Canada, Partie II, vol. 118, n 25 (12 déc. 1984).

46 Accord sur la mise en oeuvre de l'article VI du GATT, article 2.2.1.1.

47Certaines tôles d'acier laminées à froid, CDA-93-1904-08, p. 29.

48 Énoncé des motifs, p. 6 (non souligné dans l'original).

49 Note à l'intention de M. Brian Brimble, 25 septembre 1995 (A.R. Index p. 107, onglet 15) (ci-après note Brimble), p. 3 (non souligné dans l'original).

50 Le Groupe spécial souligne que, d'après Revenu Canada, la méthode qu'il a utilisée pour les intrants combinés (soit l'attribution d'une moyenne pondérée) donnait une bonne indication "du coût réel du sucre raffiné, fait de sucres bruts de toute provenance, qui est vendu sur le marché intérieur". Énoncé des motifs, p. 7. L'utilisation du mot "réel" prête à confusion, compte tenu en particulier du fait que Revenu Canada a souligné plus tard que sa méthode [TRADUCTION] "ne traduisait pas le coût de production réel des marchandises". Mémoire de Revenu Canada, p. 12.

51 Note Brimble, p. 5.

52 Id.; voir le mémoire de Revenu Canada, p. 49.

53 Id.

54 Note Brimble, p. 3.

55 L'avocat de Savannah a dit que la plaignante avait traité l'envoi de Michigan Sugar de façon fictive comme une vente nationale. [TRADUCTION] "En d'autres termes, nous prenons le sucre de Michigan et nous l'envoyons de l'autre côté de la frontière, mais nous traitons en réalité l'achat de Michigan Sugar comme un achat national pour notre vente aux États-Unis". Transc. audience publique, p. 95 (Pearson), voir également id. p. 338

56 Énoncé des motifs, p. 6.

57 Note Brimble, p. 5; voir le mémoire de Revenu Canada, aux pages 49 et 55; note au dossier de l'agent (10 mars 1995), A.R. Index, p. 113, onglet 8, p. 19 à 21 (pas de version publique).

58 Transc. audience publique, p. 268 (Pearson).

59 Mémoire de Revenu Canada, p. 12.

60 Id.

61 Certaines tôles d'acier laminées à froid, CDA-93-1904-08, p. 29.

62 Id.; voir Mémoire de Savannah, p. 38.

63 Certaines tôles d'acier laminées à froid, CDA-93-1904-08, p. 31.

64 Id. p. 29.

65 Note Brimble, p. 3; voir le mémoire de Revenu Canada, p. 21.

66 Voir transc. audience publique, p. 270 et la note sur la décision de l'exportateur (14 août 1995), A.R. Index, p. 113, onglet 3 (pas de version publique).

67 Partie confidentielle de la transcription de l'audience, 10 juillet 1996 (ci-après transc. de l'audience confidentielle) p. 15 (Pearson) (déclaration non confidentielle) [TRADUCTION] "Les marchandises expédiées depuis les établissements de Michigan étaient, dans tous les cas, du sucre tiré de betteraves sucrières".

68 L'avocat de Savannah a reconnu ce qui suit : [TRADUCTION] "L'alinéa 15e) de la Loi énonce fondamentalement que les valeurs normales doivent être déterminées à l'établissement à partir duquel les marchandises sont expédiées au Canada. Nous ne contestons pas cette interprétation". Transc. audience publique, p. 141 (Pearson).

69 Note Brimble, p. 3.

70 Énoncé des motifs, p. 5.

71 Mémoire de Revenue Canada, p. 14; Énoncé des motifs, p. 5.

72 Id.; voir également transc. audience confidentielle, p. 93 (Woyiwada) (aucune version publique).

73 Énoncé des motifs, p. 5.

74 Mémoire de Revenu Canada, p. 13.

75 Mémoire de Revenu Canada, p. 12; Énoncé des motifs, p. 6.

76 Transc. audience confidentielle, p. 8 (Pearson) (déclaration non confidentielle). Revenu Canada [TRADUCTION] "a fait simplement les opérations arithmétiques normales qui sont nécessaires pour additionner le stock et soustraire les livraisons afin d'en arriver à la consommation. Il s'agissait simplement d'additionner et de soustraire pour obtenir le résultat". Id. p. 9 (Pearson) (déclaration non confidentielle).

77 Transc. audience confidentielle, p. 11 et 12 (Pearson).

78 Transc. audience publique, p. 319 (Pearson).

79 [TRADUCTION] "D'après les documents et la correspondance que j'ai cités plus tôt, le document VE11 indique le dénombrement des articles stockés". Transc. audience, p. 268 (Woyiwada).

80 Selon MM. Trakman et McGill, membres du Groupe spécial, la justification de Revenu Canada à l'égard des calculs mensuels est raisonnable, compte tenu du court cycle de production des marchandises en cause et de la rotation rapide des stocks d'intrants de sucre brut.

81 Mémoire de Savannah, p. 53.

82 Transc. audience publique, p. 47 (Pearson).

83 Mémoire de Revenu Canada, p. 66.

84 Id., p. 27.

85 Id., p. 65 et 66.

86 Paragraphe 2(1) de la LMSI.

87 Transc. audience publique, p. 292 à 294 (Woyiwada).

88 Mémoire de Revenu Canada, p. 65, où l'article 2 de l'Accord sur la mise en oeuvre de l'article VI de l'Accord général sur les tarifs douaniers et le commerce de 1994 est cité à la note 8, sous-paragraphe 2.4.1.

89 Voir, p. ex., Acceptation d'un engagement et la suspension de l'enquête de dumping concernant certains boulets en acier moulé pour broyeurs, originaires ou exportés des États-Unis d'Amérique et produits par ou au nom de Capitol Castings Inc., de ses successeurs et ses cessionnaires des États-Unis d'Amérique, dossier n 4258-79 (APW/824), o 15 décembre 1989, p. 6 et 7.

90 Mémoire de Savannah, p. 21.

91 Id.